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[MON] Une bonne nouvelle ne l'est pas pour tout le monde

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Message par Anaïs de Lugnan-Vellini Ven 12 Aoû - 23:31

Être une Dame, ce travail de tous les instants. Plus encore lorsque votre domaine se trouve à un point A, que celui de votre époux se trouve à un point B fort éloigné du point A, que vous avez deux enfants mais pas les moyens de payer une armée de domestiques pour garder un œil sur eux lorsque vous devez vous occuper de la défense des terres de votre cher et tendre qui ne comprend rien en tactique de défense. Évidemment, il faut savoir faire tout cela avec classe et raffinement. Être bien coiffée, bien habillée, courtoise en toute circonstance. Que d'efforts à fournir trois cent soixante-cinq jours par an.

Ou presque. Si toutes ces astuces avaient fait leurs preuves, Anaïs trouvait qu'il était de temps s'accorder une pause. Deux jours. Deux jours suffiraient. Deux jours sans domestiques. Deux jours sans sortir de chez elle, sans s'habiller, sans se coiffer. Deux jours sans enfants. Et des grasses matinées. Oh oui ! Surtout ça. Des grasses matinées. Ce serait fantastique ! Mais pour cela, il fallait régler deux choses : se débarrasser d'Henri et trouver à qui confier Georges, voire Wilgeforte.
Pour le premier, le problème fut assez facile à régler. Son domestique s'étant lié d'amitié avec quelques gens de Monteroni et de Ladispoli, Anaïs lui octroya deux jours de repos qu'il pouvait utiliser comme bon lui semblait. Un tel cadeau ne se refusait pas si bien que la jeune femme n'eut pas à répéter la proposition deux fois.
Restait encore la question des enfants. Les Lugnan ne s'étaient pas mis d'accord pour engager une jeune femme pour s'occuper de Georges et de Wilgeforte, il ne restait, dès lors, plus qu'une solution : Rozenn.

Après avoir déambulé dans les couloirs du château de Ladispoli en suivant les dalles de couleurs, après avoir salué chaleureusement sa jumelle et s'être retrouvée assise devant de la bectance, Anaïs entra dans le vif du sujet :


- Rozenn, j'ai une faveur à te demander. Notez qu'à ce moment précis, les yeux bleus de la Lugnan-Vellini hurlaient « S'il te plaiiiiit »

-Et c'est....? Air suspicieux.

- Serait-il possible d'accueillir Georges pour deux jours ? Peut-être pour trois nuits. Et euh... Wilgeforte aussi ?

Rozenn lâcha un soupir soulagé, s'attendant à un truc bien pire venant d'une blonde.
- Fastoche ! Quand ça ? Même pas elle se rendait compte qu'elle se faisait rouler dans la farine.

- Dans trois ou quatre jours, cela te conviendrait ?

-Euuuuuuh.... T'aurais pu m'prév'nir avant quomême ! Fit-elle en se grattant le menton. Va falloir que j'trouve des trucs à faire avec un bébé moi maint'nant. En trois jours. Défi accepté ! Pour le "rel'vé" on verra ça s'tu les récupères entiers, conclut-elle en se marrant.

- Tes filles sont encore entières, je pense donc que cela est réalisable sans trop de casse !

-Ah nan mais c'pas pour Wilgeforte que j'm'inquiète. D'ailleurs t'sais que j'l'ai connue la vraie qu'a été sanctifiée ?... Bai donc ! Nan c'pour Georges que j'm'inquiète ! Les garçons chez nous hein, c'pas courant !

Après l'avoir rassurée sur le fait que son fils était capable de s'amuser comme un petit fou avec un bout de bois et un ruban et avoir discuté pendant plusieurs dizaines de minutes avec sa sœur, Anaïs prit congé.

Cinq jours plus tard, Anaïs profitait de sa grasse matinée, affalée dans son lit, à côté de son Yvain qui avait tout de même un peu plus de dignité dans le sommeil. Henri était parti la veille en milieu de journée, et Georges et Wilgeforte, dans la soirée. Le castellaccio était incroyablement calme et pour un mois d'août la chaleur n'était pas trop étouffante. Alors pourquoi, mais POURQUOI une petite voix irritante venait chagriner les oreilles de la blonde ? Lentement elle releva la tête, les yeux toujours clos, cherchant à tendre l'oreille pour savoir d'où cela pouvait venir. Silence. Peut-être avait-elle rêvé. Et puis à nouveau, cette voix inconnue, lointaine, mais qui semblait hurler plus que de raison. Cette fois, la Lugnan-Vellini se leva, fort mécontente à l'idée d'être dérangée durant sa toute première mais déjà avant-dernière grasse matinée de l'année. La voix semblait provenir de la fenêtre, ou plutôt, en contrebas de la fenêtre. Avec délicatesse elle repoussa le rideau cherchant à voir sans être vue, et distingua un homme, qui lui était tout bonnement inconnu, planté devant la porte en train de regarder tout autour de lui. A sa livrée, Anaïs comprit qu'il s'agissait d'un coursier. Misère.

En envoyant son unique domestique en vacances, Anaïs se retrouvait à devoir faire par elle-même ce qu'elle déléguait auparavant. Le comble lorsque l'on veut être tranquille. La mort dans l'âme, mais bien décidée à retourner se coucher aussi tôt que possible, la blonde sortit de la chambre, arpenta les couloirs, descendit en traînant des pieds les couloirs pour se retrouver face à la porte d'entrée. Elle n'était ni peignée, ni vraiment éveillée, ni correctement vêtue. Mais qu'importe ! Ce n'était qu'un pauvre messager qu'elle ne verrait probablement plus jamais par la suite. La porte ouverte, elle grommela les quelques mots d'italiens qu'elle connaissait pour savoir ce qu'on lui voulait. Pour réponse, on lui indiqua dans un français tout aussi approximatif voire carrément inintelligible qu'il avait une lettre à remettre à l'Ecuyer de Ladispoli.

Tout ça pour ça. La porte refermée, Anaïs prit le chemin du retour vers la chambre en pensant plus à son lit qu'à la lettre qu'elle tenait entre ses mains. Mais une fois la porte passée, voyant Yvain qui lui n'avait pas bougé d'un pouce depuis qu'elle était descendue, Anaïs fut prise d'une pointe de jalousie. Pourquoi serait-elle dérangée et pas lui ? Injuste, totalement injuste. Alors à pas de loup, elle se glissa dans le lit et déposa la lettre sur le nez de son mari avant de se blottir contre lui, les yeux fermés. Et pour être sûre de le réveiller, elle crut bon d'ajouter en soufflant :


- Ça vient d'arriver pour vous.

Quant au contenu de la lettre, il ne l'intéressait pas le moins du monde.
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Message par Yvain de Lugnan Sam 13 Aoû - 0:12

Il ne savait pas quelle mouche avait piqué son épouse pour qu'elle décida de congédier l'entièreté du castelaccio pour deux jours. Pas même les cuisinières n'avaient été épargnées et aucune d'entre elle n'avait osé pointer le bout de son nez dans l'espoir d'un changement d'avis. Ils étaient seuls au monde, à devoir s'occuper de leurs bains, de leurs repas, de leurs vêtements, de leur ménage... Face à tant d'accablement, le Lugnan avait du faire des choix tactiques afin de ne pas mourir de fatigue. Ainsi décida-t-il de ne pas se laver avant le retour d'une personne qui saurait faire chauffer son eau, de ne pas s'habiller puisque personne ne serait là pour le voir en tenue de nuit si ce n'était sa belle blonde -tout aussi mal fagotée d'ailleurs- et surtout d'attendre le retour de quelqu'un pour passer le balai. Ne lui restait plus que la corvée de se sustenter sans personne pour l'aider. S'il savait manger tout seul depuis bien longtemps, il n'avait certainement pas connaissance de l'art de la cuisine. Aussi, d'un commun accord avec sa fainéante épouse, décision fut prise de manger simplement des fruits, voire des légumes en cas de motivation extrême pour l'épluchage. De toute façon, vu le trop peu d'activité physique qu'ils allaient fournir pendant ces courtes vacances, ils n'avaient guère besoin de plus pour survivre. En d'autres termes, Yvain et sa belle un peu défraîchie vivraient comme deux grosses loques sans responsabilités l'espace de deux petites journées.

Il profitait donc de cette première véritable grasse matinée avec un plaisir sans borne. Rien ne pouvait le réveiller, pas même le sifflement désagréable du coursier qui désespérait qu'on lui ouvrât la porte. Son inconscient fut satisfait en voyant qu'Anaïs se déplaçait. Il avait misé sur l'instinct de survie maternel, cet espèce de pouvoir magique propre aux femmes qui fait qu'elles entendent tout ce qui peut engendrer un potentiel danger pour leur famille, et il avait gagné. Yvain se renfonça donc un peu plus dans le lit, définitivement prêt à dormir au moins jusqu'à ce que le soleil atteigne son zénith. Son inconscient l'avait déjà rejoint dans le sommeil profond car il ne fit même pas attention au retour de la blonde à moitié endormie. Une belle erreur que de ne pas garder son inconscient aux aguets pour se protéger des réveils intempestifs... En aussi peu de temps qu'il en faut pour dire "merde", le Lugnan se retrouva avec une lettre sur la figure. Il grommela, dans l'espoir qu'il s'agisse d'une bête qui fuirait en l'entendant. Malheureusement, cette attaque physique frontale fut suivie d'une attaque psychologique sournoise dans l'oreille : le chuchotis. Il ouvrit difficilement les yeux, l'air particulièrement dépité qu'elle ose le réveiller pour une simple lettre qu'il pouvait lire plus tard. Pas encore assez réveillé pour rétorquer qu'elle n'était pas obligée de le réveiller pour ça. Il passa sa main sur son visage pour se frotter les yeux et pousser la lettre avant de resserrer son étreinte autour d'Anaïs, déjà rendormie.

Il garda les yeux rivés vers le plafond quelques minutes avant de grommeler une nouvelle fois. Il n'arrivait plus à se rendormir, il était déjà bien assez tard. Sa mine impassible continua de fixer le plafond encore de longues minutes avant qu'il ne se décida à se lever pour de bon. Il s'extirpa donc discrètement du lit, essayant de ne pas réveiller sa belle au bois dormant, et alla s'asseoir devant la commode. Il ne s'asseyait jamais ici, une place strictement réservée à son épouse, mais comme il n'avait pas envie de quitter la pièce, au cas où le contenu de cette lettre soit véritablement important et qu'il faille la prévenir, et surtout parce qu'il ne voulait pas la quitter des yeux et profiter de ce visage si détendu, il n'avait pas d'autre possibilité pour s'asseoir. A part le bord du lit, mais c'était risquer d'enfoncer le matelas et de faire glisser Anaïs vers lui. Avec sa nonchalance caractéristique, il décacheta la lettre et fronça les sourcils en constatant qu'elle émanait de Guido, le benêt à tout faire de son imbécile de cousin. Que diable lui voulait ce foutu rouquin ? Avait-il seulement conscience qu'il venait de les déranger pendant leurs deux seuls jours de repos de l'année ? Passablement irrité, il déroula le reste du parchemin et entama sa lecture. Heureusement, le pli était bref. tellement bref qu'il ne mit pas longtemps à rouler deux grands yeux verts l'espace d'une demie seconde avant de lâcher un très audible et intenable :


-Quoi ! Il tourna aussitôt la tête vers la Vellini, qu'il avait probablement réveillée. Alors perdu pour perdu, il ajouta : Mon cousin se marie.

Se souvenant soudainement de leur petite discussion à Ladispoli, il sourit en coin et en remit une dernière couche, histoire d'être bien sur qu'elle était réveillée maintenant. Il n'y avait pas de raison qu'il soit éveillé et pas elle, alors qu'il savait pertinemment qu'elle avait fait exprès de lui coller cette lettre sur la tête un peu plus tôt.

Alors. Qui est le plus décent maintenant ? Hum.
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Message par Anaïs de Lugnan-Vellini Sam 13 Aoû - 18:09

Anaïs se trouvait si près de son mari, et pourtant si loin. A peine recouchée, elle s'était rendormie et n'avait donc pas remarqué qu'Yvain s'était extirpé du lit pour lire la missive qu'elle venait de lui apporter. Malheureusement, son mari ne lui accorda que quelques minutes de répit et le réveil fut tout aussi soudain que douloureux, l'exclamation d'Yvain la faisant sursauter et se cogner dans la tête de lit en bois. Après avoir brièvement frotté l'arrière de son crâne, Anaïs s'apprêtait à enguirlander son indélicat de mari, mais le Lugnan ne lui en laissa pas le temps.

Avait-elle bien entendu ? Était-ce une plaisanterie ? Ou son cerveau était-il en train dérailler après le violent coup contre la tête du lit ? Ou était-ce Yvain qui était en train de perdre la boule ? Son cousin ? Se marier ? Pardon ?


- Rodrigue ?!

Évidemment. Yvain n'avait qu'un seul cousin. Voulant en savoir plus que ce que lui disait son mari, Anaïs sauta hors du lit et vint lui chiper le pli d'entre les mains. La lettre avait beau être courte, elle n'était pourtant pas avare en détails. Guido écrivait que Rodrigue allait se marier en décembre avec une dénommée Lucia Casari, fille d'un des plus gros marchands de Giglio, que la dénommée Lucia était magnifique avec ses cheveux et yeux bruns et qu'elle ferait une merveilleuse marquise de Giglio. N'en jetez plus, la coupe est pleine ! Anaïs ne voila même pas son agacement, encore moins lorsqu'Yvain se mit en tête de faire le fanfaron en mode « Je vous l'avais bien dit ! ».

Sauf qu'il avait raison. Rodrigue venait de prouver qu'il n'était qu'un coureur de jupons sans foi ni loi et certainement un goujat de premier ordre. Puisse ce mariage être une catastrophe ! La petite blonde bouillonnait et traitait intérieurement Rodrigue de tous les noms, pour finalement s'exclamer :


- Mais c'est incroyable ! Quand a-t-il quitté Astride ? En mars ? Et il va achever l'année marié avec une fille de marchand ? Scandaleux.

Inutile de préciser que la Lugnan-Vellini restait particulièrement fumasse. Et plus les minutes passaient, plus elle s'énervait. Elle avait toujours été compréhensive avec lui, même quand cela nécessitait de ménager les subtilités des deux cousins, même après avoir quitté Astride, même après avoir délaissé Monteroni pour son île de marins pouilleux.
Blasée, Anaïs posa la lettre sur la commode et alla s'affaler sur le lit, fixant le plafond. Elle détestait être prise pour une idiote et, plus encore, devoir remettre en cause son jugement sur quelqu'un. Hélas, le constat était accablant : Rodrigue était sombre crétin et l'on ne pouvait plus rien faire pour lui.

Restait encore un élément à ne pas négliger :  Astride. Personne ne pouvait vraiment dire si elle s'était remise de cette séparation. Comment allait-elle réagir en apprenant que son ancien fiancé avait déjà mis le grappin sur une autre donzelle ? Mal, assurément. Anaïs se redressa et fixa Yvain car l'heure était grave :


- Il ne faut pas qu'Astride l'apprenne, sinon je crains que Rozenn ne se retrouve avec des frais monstrueux à investir sur Hendaye…

Elle finirait bien par l'apprendre. Rozenn elle-même allait finir par le savoir et serait capable de le répéter à Astride sans vraiment le vouloir. Mais il fallait que cela se passe le plus tard possible. Peut-être que d'ici là, Rodrigue aurait été relégué dans la catégorie « mauvais souvenirs » comme on remise un vieux meuble dans un grenier. Et c'était bien tout ce qu'il méritait.
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Message par Yvain de Lugnan Sam 13 Aoû - 23:03

Il s'attendait certes à une réaction de son épouse, mais certainement pas à une réaction aussi vive. A peine quelques secondes plus tôt elle dormait paisiblement, presque avec un sourire angélique sur le bout des lèvres, et maintenant elle ressemblait plutôt à un spécimen rare de blonde mal coiffée ET mal sapée. Comment diable faisait-elle pour trouver autant d'énergie en si peu de temps ? Lui avait eu un mal de chien à se tirer jusqu'au siège de la coiffeuse... En clair, il était dégoûté de voir que même en vacances, elle le surpassait alors qu'elle avait bien promis qu'elle n'en foutrait pas une pendant deux jours entiers.

Les ronchonnements d'Anaïs concernant la prétendante de son cousin lui passaient bien au dessus de la tête, lui était focalisé sur le fait qu'elle devait absolument revenir sur ce qu'elle avait osé lui dire lors de leur dispute à Ladispoli. Il n'oubliait jamais rien, et ne digérait surtout jamais dès que son cousin entrai dans l'équation. Il fut pourtant bien contraint d'y prêter quelque attention lorsqu'elle se mit à le fixer pour lui interdire d'écrire à Astride afin de la prévenir. Là, son cerveau marqua une courte pause. Mais c'était bien sur ! Comment n'y avait-il pas songé dès la fin de sa lecture ? Décidément, il n'était pas réveillé, et elle le surpassait vraiment quelle que soit l'heure de la journée. Une fois son cerveau remit en route, il accorda un sourire en coin à son épouse, l'un de ces sourires qui voulait tout et rien dire, car pouvant être interpréter comme un "bien sur, je n'oserai jamais" mais aussi comme un "cause toujours tu m'intéresses". En l'occurrence ici, il s'agissait de la deuxième solution. Alors pour éviter d'éveiller les soupçons de sa belle blonde, il ferma lentement les yeux en penchant légèrement la tête vers l'avant pour montrer son approbation. Il devait certes penser aux éminents dégâts qui seraient causés à Hendaye, mais il ne pouvait pas laisser une si belle occasion de rendre la monnaie de sa pièce à cette saleté de rouquin prétentieux et idiot.

Il était temps d'enclencher le plan "Astride" et de clore cette discussion. Rien de plus facile avec une épouse qui lui avait assuré qu'elle ne bougerait pas le petit doigt pour ces deux jours. Il se leva donc de son siège et vint poser une main de chaque côté de la Vellini tout en se penchant lentement vers l'avant jusqu'à ce qu'elle retombe complètement allongée. Prise au piège, elle ne pouvait plus lui échapper et serait bien forcée de lui répondre cette fois.


-Et ma question ? L'auriez-vous oubliée ? Ne suis-je point plus décent ?

Coincée, Anaïs fit une moue boudeuse. Elle allait devoir admettre son erreur. Tant pis !

-Vous êtes bel et bien plus décent. Petit sourire provocateur : Sauf si vous me quittez pour trouver une nouvelle femme en cinq mois vous aussi.

Chargé d'un sourire en coin pour la deuxième fois de la journée -grosse journée pour ses zygomatiques aujourd'hui- il s'approcha suffisamment pour lui frôler les lèvres avant de souffler : Jamais. Vous êtes Ma Dame. Il avait bien insisté sur le "ma" avant de déposer un baiser là où il n'avait fait qu'effleurer. Après quelques secondes, il se releva, cette fois ci bien éveillé, comme si ce baiser lui avait donné un coup de fouet !

-Ma Dame. Je sors. En balade méditative.

Il allait la laisser profiter d'un calme plus qu'olympien au castelaccio, puisqu’elle serait la seule âme à y vivre pendant quelques heures. Elle le méritait bien, de n'avoir qu'elle à s'occuper et rien à penser. Cela lui permettrait de rédiger sa lettre à destination d'Astride en tout quiétude, sans avoir peur d'être dérangé par une Vellini ayant finalement décidé de faire autre chose que larver dans son lit. Alors une fois dehors et suffisamment loin de l'imposante demeure, il se chercha un coin calme et discret pour entamer la lettre de sa vie. L'enjeu de cette lettre était si énorme que même lui n'était pas tout à fait sur d'en mesurer toute l'ampleur. S'il savait qu'Astride viendrait ruiner le bonheur de son cousin, il n'avait aucune idée de jusqu'où elle serait prête à aller pour y parvenir. Il secoua la tête de gauche à droite, essayant de se persuader qu'après tout ce n'était qu'une petite blonde muette avec un joli minois et haute comme trois pommes. Elle ne pouvait probablement pas fomenter des vengeances qui dépassent l'entendement... Dans le pire des cas elle irait à Giglio et irait tout casser à l'intérieur du château... N'est-ce pas ? Fort de cette idée qui lui semblait tout à fait acceptable comparativement au préjudice qu'il avait personnellement subi, il écrivit :


De moi, Yvain de Lugnan,
A vous, Astride Vellini,

Bonjour.

Rassurez-vous. Ce n'est point pour moi que j'écris. Je me porte à merveille. Du moins. Autant que je le puisse. L'Italie est un beau pays. Vous devriez venir. Et vous viendrez. Je le sais. Car j'apporte une mauvaise nouvelle. Le saviez-vous ? Rodrigue se marie. En décembre. La prétendante est brune. Italienne. Fille de marchand. Et elle parle. En somme. Elle est votre contraire. Vous voudrez la voir. N'est-ce pas ? Je suis navré. Navré qu'il vous traite ainsi. Ne vous énervez point. Je vous en prie. Puisse le Très-Haut vous guider. Chère belle-soeur. Nous rentrons bientôt. Vous pourrez venir. Si vous le souhaitez.

Courage.

YdL.

Satisfait de ce petit effet dramatique, il s'accorda son troisième et dernier sourire en coin de la journée. Il lui avait proposé de venir à Biriatou, mais il savait qu'elle ne viendrait pas, qu'elle n'aurait pas envie de les voir. Décidément ravi d'avoir de tels talents d'acteur épistolaire, car il était bien incapable de jouer la comédie de vive voix, il partit en quête d'un coursier qui ferait parvenir ce pli à Hendaye le plus rapidement possible.
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Message par Astride Vellini Dim 14 Aoû - 14:13

Les travaux du cloître allaient bon train. D'après le maître bâtisseur, cela ne prendrait pas plus d'une année si la cadence et le nombre d'hommes assignés au chantier ne variait pas. Quelques retards étaient donc à prévoir, car il était bien évident que lors des mois d'hiver, les travaux avanceraient beaucoup moins rapidement. Quoi qu'il en soit, que le chantier dure huit mois ou deux ans ne la dérangeait pas outre mesure. Pendant ce temps, elle profitait de la présence de son neveu et ne préférait même pas penser au moment où il la quitterait pour sa vie d'ermite religieuse. Elle avait déjà prévu de confier une mission à ce cloître, les religieux essayant toujours d'apporter leur aide à la cité les accueillant. Grâce à cela, son neveu sortirait de temps en temps et elle pourrait donc le voir. En somme, les quelques années à venir étaient déjà toutes réglées et rien n'était susceptible de modifier l'équilibre qu'elle avait instauré sur ses terres. La vie à Hendaye était prospère et dynamique, les habitants s'étaient rapidement fait à la particularité de leur suzeraine, notamment parce qu'elle faisait dispenser gratuitement des cours de lecture et d'écriture à celles et ceux qui se donnaient la peine de venir. Tous savaient que si elle le faisait, c'était pour leur permettre de communiquer avec elle, mais ils voyaient aussi cela comme une chance d'élévation sociale, ou au moins une possibilité de ne plus se faire rouler dans la farine par les bourgeois cultivés qui leur faisaient toujours signer des contrats qu'ils étaient incapables de comprendre.

Cette stabilité apparente fut pourtant troublée par l'arrivée d'une missive tandis qu'elle se trouvait attablée à son bureau, en train de rédiger quelques documents d'importance pour la gestion de son port. Elle posa son regard bleu azur sur l'homme à tout faire d'Hendaye. Il s'agissait d'un ancien soldat, devenu sourd comme un pot à force de tirer à la bombarde. Astride fut bien la seule qui osa lui proposer un emploi. Mais qui de mieux qu'un sourd pour s'occuper d'une muette ? Au moins il ne répétait pas sans arrêt "Heiiiin ? J'ai pas entenduuuuu.", puisqu'il savait qu'aucun son ne sortait jamais de la bouche de la blonde. Pour autant, vu qu'il n'était pas sourd de naissance, il parlait. Certes un peu fort, mais cela mettait un peu de vie dans le morne silence du château. Il déposa donc la lettre sur le bureau avant d'ajouter qu'elle venait d'Yvain de Lugnan ; il avait reconnu le sceau. Astride ayant pris soin de lui montrer un exemple de tous les sceaux qui revêtaient un caractère important. Heureusement pour lui, la liste était courte, elle ne comportait que trois modèles : Rozenn, Yvain et Anaïs. Ce qui lui fit d'ailleurs penser qu'elle n'avait pas de sceaux, elle. Elle claqua sa langue contre son palais, fermement décidée à s'intéresser à ce sujet une fois cette lettre lue.

Elle déroula lentement le vélin, se doutant qu'il devait s'agir d'une demande d'informations sur les plantes médicinales disponibles à Monteroni. A cette idée, elle fronça les sourcils. Evidemment, elle connaissait toutes les plantes qui se trouvaient sur le sol de la vicomté de sa soeur, mais si tel était le cas, c'était parce que Rodrigue l'y avait emmenée. Rien que d'y repenser, la jeune femme se sentit l'envie de déchirer cette lettre en d’innombrables petits morceaux. Pourtant elle devait venir en aide à sa famille, peut être était-ce grave, voire si urgent qu'il était peut être déjà trop tard. Elle plissa les yeux et entama sa lecture. Si dans un premier temps elle fut soulagée de voir que son beau-frère se portait très bien et qu'elle n'allait donc pas devoir mettre à profit les connaissances acquises grâce au rouquin, elle fut, dans un second temps, surprise de recevoir une lettre d'un Yvain se portant à merveille. Il n'avait pas l'habitude de se rompre à ce genre d'exercice lorsqu'il allait bien, préférant le silence et la méditation. Ce pli cachait donc quelque chose de louche, qui ne manqua pas d'être dévoilé quelques phrases plus tard. Elle roula alors de grands yeux ronds comme des billes qui auraient viré au noir si cela eut été possible. Ses petits doigts fins et crispés ne purent se retenir plus longtemps de chiffonner cette lettre avant de la balancer plus loin dans la pièce. Elle tenta tant bien que mal de se contenir pour ne pas renverser tout le mobilier du bureau, surtout le document administratif en train de sécher sur son écritoire.

Pourtant, elle ne réussit pas à se retenir bien longtemps, et la tapisserie qui trônait fièrement près de la fenêtre ne fit pas long feu et passa par la fenêtre. La demeure seigneuriale n'étant pas bien grande, Andore n'eut aucun mal à voir que quelque chose n'allait pas chez la maîtresse de maison. Il n'avait évidemment rien entendu, mais il avait vu la tenture tomber du premier étage. Et à priori, il n'y avait aucune raison apparente pour qu'il pleuve des tapisseries. Il se hâta donc vers le bureau et sans même réfléchir plus longtemps, prit la dame d'Hendaye qui se débattait sous son bras et alla rapidement la ranger dans une pièce spécialement conçue pour recevoir les sautes d'humeur de la minie Vellini. Cette pièce était en sous sol et ne comportait que de petites fentes vers l'extérieur en guise de lumière. Elle était pleine de mannequins en paille et d'armes émoussées qui permettaient de se défouler sans ruiner les économies de la seigneurie. Et, comme s'il s'agissait d'un animal sauvage qu'on ne pouvait pas abattre et qu'il fallait donc enfermer dans une cage pour sauver l'humanité, il ressortit et ferma la porte avant de rester assis devant. Ils avaient un code. Lorsqu'elle serait calmée et prête à sortir, elle viendrait taper deux coups contre la porte. Là, il devrait taper un coup pour lui demander si elle était bien certaine qu'elle pouvait sortir. Si elle parvenait à se tenir en ne donnant qu'un seul coup, elle pouvait sortir, s'il y en avait plus, elle restait coincée. Ce ne fut que lorsque la lumière du jour n'était plus suffisante pour éclairer l'intérieur de la pièce qu'elle se présenta à la porte pour sortir. Une fois dehors, le pauvre domestique ne put que constater l'ampleur des dégâts... De la paille partout, des bouts de robe même, et des épées carrément plantées dans les rainures entre les pierres. Si à l'époque de la construction de cette salle il n'avait pas vraiment compris son utilité, imaginant mal comment une petite femme de ce gabarit pouvait causer quelconque dégât, il avait désormais la preuve que les apparences étaient parfois trompeuses...

Avec un sourire presque carnassier, un regard déterminé, une tenue à moitié déchirée et surtout avec une coupe de cheveux à rendre fou n'importe quel coiffeur, elle leva le pouce en direction d'Andore comme pour lui signaler que tout allait bien. De son autre main elle lui tendit sa couronne avec un petit signe de tête, pour lui indiquer d'aller la ranger à sa place. Elle s'occuperait de ses sceaux et de ses devoirs de dame plus tard, là elle avait à faire dans son laboratoire. D'un pas lent, elle se traîna jusqu'à son sanctuaire et claqua bruyamment la porte. Pour décembre, elle avait largement le temps de mettre sur pieds un plan pour lui faire payer au centuple l'affront qu'il venait de lui faire. Elle, elle ne l'oubliait pas. Bien qu'elle n'en donnait pas l'impression, elle vivait avec un vide dans le coeur, un vide qu'elle ne parvenait pas à remplir malgré les belles journées qu'elle passait à Hendaye. Au fond, elle espérait que cela se passerait comme la dernière fois qu'ils s'étaient quittés, qu'ils se retrouveraient et qu'ils oublieraient leurs différents pour repartir de plus belle. Mais apparemment elle s'était fourvoyée. Elle l'aimait encore. Mais lui. Lui l'avait déjà oubliée dans les bras d'une autre alors qu'il lui avait dit qu'il l'aimait juste avant de partir. Il avait menti. Il avait osé lui mentir. Et s'il y avait bien une chose qu'elle ne supportait pas, c'était le mensonge.
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