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C'est un requin ? Une sirène ? Non mieux ! Une Lucia !

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C'est un requin ? Une sirène ? Non mieux ! Une Lucia ! Empty C'est un requin ? Une sirène ? Non mieux ! Une Lucia !

Message par Lucia de Liancy Sam 30 Avr - 19:46

Depuis que le marquis lui avait proposé de partir en voyage à Florence, la jeune femme s'était échinée pour trouver une raison officielle à cette promenade en dehors de l'île. Car elle en était persuadée, si elle quittait l'île avec pour seul prétexte que le marquis avait souhaité sa présence sur le navire, les ragots allaient aller bon train à Giglio. Les femmes ne pouvaient pas sortir, c'était presque une tradition. Les seules qui avaient réussi à voir la mer de près étaient celles qui s'étaient vues mariées à un homme du continent, ce qui n'était certainement pas son cas. Les rumeurs de mariage couraient si vite qu'il était déjà trop tard pour en lancer une. D'autant qu'il lui aurait fallu trouver un homme prêt à jouer le jeu, ce qui n'aurait pas manquer de lui faire perdre encore plus de temps. Il fallait donc que son excuse ne soit pas un mariage, mais autre chose. Ne trouvant aucune solution seule, et ne voulant guère ennuyer le marquis avec ces "petits problèmes sans importance", du moins pour lui, elle n'avait plus qu'une seule personne vers qui se tourner : son père. Elle avait donc demandé à rentrer chez elle pour quelques jours, laissant le temps au Liancy de se promener avec les autres femmes du château sans qu'elle ne puisse les voir. Ce qui n'était pas un mal, elle eut été capable de demander à Guido de l'aider à ruiner tous les rendez-vous un par un pour ne leur laisser réellement aucune chance. Il valait donc mieux qu'elle s'éloigne, en expliquant bien évidemment que cet éloignement temporaire n'avait rien à voir avec lui et qu'elle cherchait simplement à éviter les bruits de couloir désagréables.

Pendant ces quelques jours dans la demeure des Casari, Fabrizio fut bien sur ravi de revoir sa fille, et plus encore d'apprendre en personne que leur plan était en bonne voie. Elle lui indiqua qu'elle devait bientôt partir pour Florence, mais qu'elle ne voulait pas que cela passe pour un privilège auprès des autres familles de l'île. Fabrizio passa alors des heures à éplucher ses contacts, tandis que Lucia tentait de lister les besoins actuels et à venir du marquisat. Puis finalement, elle redressa la tête avant de lever les yeux au ciel, comme s'ils venaient de perdre leur temps parce qu'ils avaient oublié de prendre en compte une information d'importance.


-Et votre grand-oncle papà mio ? Ne vend-t-il point des soieries digne des plus grandes soirées mondaines ? Depuis que nous avons un marquis, qui de plus semble apprécier les festivités, nous devons absolument nous fournir en tissus d'une qualité irréprochable.

Ils se regardèrent comme si elle venait de dire quelque chose qui coulait de source. Dans la foulée, le patriarche rédigea une lettre à l'attention du fils de son grand-oncle, car le pauvre avait trépassé depuis tout ce temps, dans l'espoir de recevoir une réponse avant que le marquis ne sonne le départ du voyage. Ne sachant guère comment le remercier, la jeune femme lui déposa une bise sur la joue en lui promettant qu'il deviendrait très bientôt le père de la marquise avec le sourire au bout des lèvres. Quelques jours passèrent encore, et elle rentra au château, forte de cette merveilleuse bonne raison. Si elle pouvait inspirer le marquis en lui donnant l'idée de lui offrir de nouvelles robes en plus de cela, ce serait la perfection.


*


Un peu moins de quinze jours après, la Casari était en balade avec le marquis dans les alentours du château. Elle l'avait déjà informé lors de précédentes promenades qu'elle avait bel et bien trouvé une justification idéale pour pouvoir l'accompagner dans ce voyage et que le cousin issu de germain de son père avait accepté avec des conditions qu'elle s'était bien gardée de dévoiler au Liancy. En effet, si Stefan avait accepté cet échange, c'est parce qu'il espérait que Lucia allait épouser le marquis et lui permettrait donc, par effet de notoriété, d'avoir plus de clientèle. Pour Rodrigue, elle avait simplement argumenté en disant que les Casari avaient un grand sens de la famille. Ce qui n'était pas tout à fait faux non plus... Au cours d'autres sorties pendant lesquelles ce sujet n'était pas abordé, elle parlait des autres femmes avec qui le marquis avait passé du temps, afin de s'assurer qu'aucune d’entre elle n'avait retenu son attention. Force était de constater qu'elle restait toujours sa favorite. Ce qui ne pouvait que l'arranger, parce que plus les jours passaient, plus la jeune femme oubliait qu'elle faisait tout cela dans l'unique but de devenir la nouvelle marquise. Elle se prenait d'attachement pour Rodrigue, appréciait réellement de passer du temps avec lui, et ne subissait certainement pas une torture sans nom à chaque fois qu'il la charmait ostensiblement. C'était avec plaisir. Un divin plaisir même... Et elle sentait qu'il ne faisait pas tout cela que dans le but de se jouer d'elle. Quelque chose, d'encore indescriptible, se passait entre eux. Et lorsqu'il lui demanda si elle était disponible les trois prochaines semaines, l'italienne n'eut même pas de mots immédiatement et elle ne put s'empêcher de s'accrocher à son cou après avoir libéré rapidement ses mains de la néanmoins délicieuse emprise dans laquelle elles se trouvaient. Le tout était accompagné d'un très léger petit cri -oui j'insiste !- indéfini de type "hiiiiiiiiiiiiiii". Ce ne fut qu'après quelques secondes qu'elle se rendit compte de la petite bévue. Elle ne se démonta pas pour autant, et les bras toujours là où elles les avaient mis, elle fit une bouche en cul de poule en regardant vers le ciel avant de lâcher un petit "Oops" en riant.


-Trois semaines ? Aurons-nous besoin d'autant de temps pour négocier la collection automne-hiver de l'île Votre Magnificence ? Douteriez-vous de mes talents de négociatrice ? Ajouta-t-elle simplement dans un sourire, au cas où des oreilles indiscrètes traîneraient dans les parages.


Dernière édition par Lucia Casari le Dim 1 Mai - 13:35, édité 1 fois
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Message par Rodrigue de Liancy Sam 30 Avr - 22:44

Rodrigue n'avait pas perdu l'audition ! En revanche, il avait gagné une belle Lucia accrochée à son cou. Machinalement il posa ses mains sur sa taille, mais aussitôt fait, le marquis fit quelques pas en arrière afin de les éloigner du chemin. Si on les voyaient ainsi accrochés l'un à l'autre, les rumeurs de mariage allaient faire le tour de l'île avant leur retour au château. Sa joie était touchante, pleine de spontanéité. Rodrigue la regarda affectueusement, délaissa l'espace d'un instant son regard purement séducteur et se mit à rire.

- Auriez-vous peur de voyager avec moi tout ce temps ? fit-il en reprenant une contenance toute Rodriguienne, astucieux mélange entre nonchalance et charme. En réalité, j'avais prévu deux semaines, mais je me suis dit qu'il était plus prudent d'ajouter une semaine supplémentaire. Les premiers jours à Florence seront consacrés aux négociations. Je pense que cela prendra cinq jours tout au plus.

Rodrigue espérait tout de même ne pas avoir à passer un temps fou dans ces négociations, mais il savait très bien que certaines personnes étaient coriaces et pouvaient volontairement rallonger les discussions pour avoir gain de cause. Heureusement pour lui, il avait convenu avec les notables qui allaient les accompagner de n'assister qu'à la partie des négociations les concernant eux et l'île, les laissant ensuite conclure des accords à titre exclusivement privé.

- Et puis je me suis dit que cela vous ferait plaisir de profiter totalement de ce séjour hors de Giglio, conclut-il dans un grand sourire.

En vérité, il voulait lui aussi profiter de cette visite à Florence pour continuer voire achever son entreprise de séduction auprès de Lucia. Le voyage se ferait en comité restreint, bien loin des regards curieux de toute l'île, de toutes les personnages logeant au château. La Casari était peut-être enthousiaste, mais Rodrigue ne l'était pas moins.


*


Une semaine c'est peu. Et pourtant Rodrigue trouva le temps long malgré tous les derniers préparatifs. Il avait dû désigner les domestiques qui les accompagneraient, mettre Guido au courant de tout ce qu'il avait le droit de faire ou non, multiplier les rendez-vous qui n'allaient pas pouvoir attendre son retour, et surtout garder son œil de lynx sur la préparation des malles. Résultat, il avait peu vu Lucia. Celle-ci devait de toute façon être tout aussi occupée que lui. Néanmoins, il avait vu son père, Fabrizio, qui très discrètement avait pris rendez-vous pour lui confier une coquette somme d'argent pour qu'il achète une robe à sa fille si jamais elle réussissait à signer le contrat tant souhaité. Le marquis avait accepté, voyant là une nouvelle occasion de se rapprocher de la belle Casari.

Le grand jour était pourtant arrivé. Toutes les malles avaient été embarquées, l'équipage était au grand complet, ainsi que la petite troupe de domestiques. Les trois notables – des proches de Fabrizio Casari – étaient bien là, ainsi que Lucia Casari, bien évidemment.
L'ancre levée, le bateau quitta lentement le port sous les yeux des badauds et de vieux marins jaloux de ces jeunes gens qui pouvaient encore naviguer. Après avoir donné quelques consignes aux domestiques puis quelques minutes passées à discuter avec les notables puis le capitaine, Rodrigue alla à la rencontre de Lucia, seule sur le pont.


- Je viens de parler avec le capitaine et il vous attend pour que vous preniez la barre. Comme je vous l'avais promis, lui dit-il en souriant, s'attendant déjà à voir une Lucia folle de joie. Dépêchez-vous car notre voyage en bateau n'est pas très long.

Il aurait voulu prendre ses jolies mains entre les siennes et se montrer bien plus entreprenant, mais il savait très bien que n'importe qui sur le pont pouvait les voir se parler. Rodrigue l'invita alors à le suivre jusqu'à la barre, échangea un mot avec le capitaine qui s'écarta de la barre pour la laisser prendre sa place. Le marquis décida de les laisser tranquilles en allant un peu plus loin pour s'appuyer sur le bastingage et observer la Casari à l’œuvre, un petit sourire au coin des lèvres. Et si jamais cela se passait mal, il pouvait toujours sauter par dessus le bastingage pour se sauver !
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Message par Lucia de Liancy Dim 1 Mai - 15:14

Quelle ne fut pas sa peine de n'avoir pu profiter une dernière fois du marquis avant leur départ pour le continent. Elle savait certes qu'elle ne l'aurait "que" pour elle les trois semaines suivantes mais cela ne la consolait que bien peu. La semaine la séparant du voyage lui parut donc d'une longueur plus qu'insoutenable. Le mardi, ses malles étaient déjà prêtes à être embarquées et elle dû se forcer à rendre visite aux invités du marquis pour passer le temps. Son seul plaisir fut de se pavaner auprès des soeurs Massari en disant qu'elle, elle allait partir avec Rodrigue tandis qu'elles, elle seraient coincées ici à attendre son retour. A attendre de passer derrière elle comme d'habitude. Elle ne manqua pas d'ajouter une petite pique en direction de Paola, lui disant qu'elle n'aurait qu'à se réfugier dans la nourriture, comme Paola Guantieri. Au moins, si elles se trouvaient aussi grosses toutes les deux, plus personne sur l'île n'aurait de scrupule à les comparer.

Enfin ! Le dimanche soir arriva et c'est avec la hâte de voir le soleil se lever qu'elle s'endormit. Au petit matin, elle se réveilla de bonne heure afin d'avoir le temps de se coiffer et de s'habiller convenablement. Elle voulait paraître irréprochable aux yeux des continentaux. Elle ne les reverrait peut être jamais, alors il fallait qu'elle fasse bonne impression. La troupe partit enfin en direction de Giglio Porto, et il n'y eu aucun adieu déchirant. Après tout, ils ne partaient pas pour longtemps et le plus risqué durait seulement quelques heures. Quelques heures de pur plaisir pour la jeune femme, puisqu'elle allait -peut-être- pouvoir tenir la barre un instant. La simple idée de monter sur le bateau l'émoustillait de toute façon déjà. Remplacer le capitaine ne serait que l'apothéose, la cerise sur ce gâteau plein de crème. Laissant charger les bagages par ceux qui avaient été désignés pour cela, elle grimpa rapidement sur le pont en relevant légèrement ses jupons. Elle se rendit sans réfléchir au niveau de la pointe pour respirer à pleins poumons. L'air n'avait rien de différent si près des côtes, mais elle voulait y croire, ou du moins se le laisser croire. En quelques minutes, le navire fut détaché du port  et commença à s'éloigner doucement des pontons. Installée comme elle le pouvait, elle regardait avec un air émerveillé cette mer qu'elle connaissait pourtant bien, pour l'avoir vue chaque jour depuis sa fenêtre. Lorsque Rodrigue l'interrompit, elle eut un léger sursaut avant de quitter le bleu de la mer pour l'émeraude de ses yeux. Elle l'écouta et cligna une fois des yeux sans bouger. Avait-elle bien entendu ? Etait-elle encore dans un état second ? Assurément. Aucun homme ne laisserait une femme à la barre... Et pourtant non ! Il revenait à la charge en lui disait qu'elle devait se presser si elle ne voulait pas manquer le coche. Elle fit alors un grand sourire et se redressa avant de faire quelques pas vers l'arrière du bateau. Elle s'arrêta, fit demi tour pour se rapprocher de Rodrigue et lui susurra quelques mots de remerciement à l'oreille avant de laisser glisser ses lèvres dans son cou, l'effleurant sans y laisser de baiser. Elle s'éloigna en faisant quelques petits pas en arrière, le regard mutin et le bout des doigts sur sa bouche avant de se retourner pour aller à la rencontre du capitaine.

Les deux férus d'astronomie échangèrent quelques mots tandis que la Casari tenait le cap avec une grande attention. Fort heureusement pour elle, le temps était clément aujourd'hui, et les vents l'attiraient dans la bonne direction. Elle remit néanmoins la barre au capitaine lorsqu'ils approchèrent des côtes, ces zones étaient bien plus difficiles à appréhender que la pleine mer. Elle le remercia chaleureusement d'avoir accepté de la laisser conduire le bateau et lui fit un signe de main en lui signifiant, le sourire aux lèvres, qu'elle espérait qu'il serait leur capitaine pour le voyage de retour. Ce fut presque sautillante qu'elle retourna sur la pointe du bateau pour retrouver le Liancy, l'air victorieux.


-Nous sommes vivants ! Félicitez moi ! J'avais votre vie entre mes mains Marquis, peu peuvent s'en vanter. Dit-elle l'air taquin en prenant ses mains et en le tirant pour tenter de le lever. Venez, je veux être la première à descendre, à fouler le sol du contient. Tandis qu'elle le tirait pour le rapprocher de là où la passerelle serait tirée, elle fronça légèrement les sourcils. Enfin... La première... La première pour cette fois j'entends.

Car oui, qu'il s'agisse des notables amis de son père, de l'équipage ou du marquis, ils étaient tous déjà sortis de Giglio et avaient posé le pied sur une terre différente de l'île. Seuls les domestiques emmenés par le Liancy n'avaient peut être jamais rien vu d'autre que les frontières de Giglio, et elle ne voulait certainement pas passer après eux pour cette journée d'importance. Le navire fut amarré un peu plus tard, et la jeune femme trépignait d'impatience de pouvoir descendre. Elle regardait déjà en bas, pour voir si les quelques femmes qu'elle pourrait apercevoir seraient mieux vêtues qu'elle ou non, si elles possédaient des objets encore inconnus sur l'île. Elle fut cependant rassurée de voir qu'elle se tenait merveilleusement bien au courant des dernières tendances de l'Empire, parce qu'à première vue, personne ne réussirait à dire qu'elle ne venait pas d'ici. Lorsque la passerelle fut enfin mise en place pour permettre à tout le monde de descendre elle releva encore une fois ses jupons et se lança dans sa descente avec un port de tête presque altier. Il fallait en jeter ! En bas, elle se retint de pousser des petits cris d'enthousiasme et resta d'une sérénité à toute épreuve. Elle laisserait éclater sa joie dans la voiture, dès que Rodrigue lui aurait indiqué celle qu'ils devaient prendre. Que ce voyage était excitant !
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Message par Rodrigue de Liancy Dim 1 Mai - 17:57

Depuis le bastingage, Rodrigue observait Lucia avec une attention toute particulière. Son sourire avait disparu. Il ressentait à nouveau le frisson qui l'avait saisi quand elle avait laissé glisser ses lèvres dans son cou, après l'avoir remercié d'avoir convaincu le capitaine de lui laisser la barre quelques temps. Lui qui était constamment sur ses gardes avait été surpris par ce geste. Le regard mutin qui avait suivi n'avait fait qu'augmenter le trouble provoqué par l'audace de la Casari. A présent c'était un léger vent qui effleurait son cou et faisait voleter quelque peu sa chevelure, mais c'était Lucia qu'il fixait. Lors de leur première rencontre, il l'avait trouvée belle, quoi que manquant de naturel, mais cela faisait des semaines à présent qu'il reconnaissait volontiers que la jeune femme à la barre du bateau était magnifique. Elle semblait heureuse alors que le voyage ne faisait que commencer, qu'elle n'avait pas eu un seul aperçu de la vie continentale, ni même vu la moindre pierre de la ville de Florence. Rodrigue regrettait sur l'instant de n'être qu'un piètre dessinateur ou de ne pas avoir emmené avec eux le jeune peintre de la famille Rivola, car la scène qui s'offrait à lui aurait mérité d'être immortalisée. Lucia le touchait, d'autant plus qu'il savait qu'il était à l'origine de cette joie. Il l'avait laissée organiser un bal, l'avait remerciée par deux magnifiques robes, l'emmenait en voyage dans une ville qu'elle avait désignée et avait fait en sorte qu'elle puisse être le capitaine de leur navire pour quelques minutes. Le Liancy se rendait compte qu'il avait fait beaucoup de choses pour elle et il était incapable de savoir si cela résultait de sa propre volonté ou  du charme de Lucia.

Le marquis fut délicieusement extirpé de ses pensées par la belle Casari qui n'était pas peu fière de son moment de gloire derrière la barre. Rodrigue retrouva son sourire et la félicita chaleureusement, tout en lui précisant qu'il n'avait pas eu peur une seule seconde à l'idée de confier sa vie entre ses mains. Et c'était vrai. Depuis qu'il la connaissait il avait toujours eu confiance en elle, sans même savoir pourquoi, une fois de plus. Il n'eut pas le temps d'en dire plus car déjà elle l'attirait pour qu'ils se préparent à descendre du navire dès que celui-ci allait s'amarrer au ponton. Une fois de plus il accepta sa requête, et ainsi Lucia fut la première à toucher le sol. Rapidement le quai fut submergé par le nombre conséquent des malles qui descendaient les unes après les autres du bateau et que les domestiques faisaient charger dans les voitures qui les attendaient un peu plus loin. Le groupe prit ensuite le chemin en direction de Florence, passant par Grosseto et Sienne où ils ne firent que de brèves haltes.

Florence apparut enfin, mais personne ne put réellement l'admirer car la nuit était tombée depuis plusieurs heures déjà quand ils arrivèrent. Les trois notables quittèrent le groupe pour prendre leurs quartiers là où ils avaient leurs habitudes, tandis que le marquis, Lucia et les domestiques prirent possession de l'hôtel particulier où ils allaient séjourner pendant trois semaines. Après une nuit réparatrice, tout le monde se retrouva le lendemain après-midi afin d'aller de rendez-vous en rendez-vous et de conclure contrats sur contrats. Au bout de quatre jours éreintants mais fructueux, toutes les négociations avaient débouché sur des signatures. Giglio serait doté d'un comptoir en relation avec Florence et Lucia Casari avait rempli la mission confiée par son père.

C'est ainsi que Rodrigue se retrouva un beau matin à parcourir les rues de Florence flanqué de deux domestiques, à la recherche de la robe que Fabrizio Casari voulait qu'il offre à sa fille. Mais le Liancy avait augmenté la cagnotte dédiée à cet effet avec son argent personnel car il tenait lui aussi à la féliciter pour cette signature importante. Pour réussir sa quête de la robe parfaite pour la brune, il s'était rendu aux meilleures adresses de la ville. Et après quelques heures d'hésitation, il opta pour une magnifique robe bleue marine, ornée de fines broderies dorées. Puis il se rendit chez plusieurs joailliers et après avoir un temps voulu lui offrir un collier, Rodrigue jeta son dévolu sur une petite boîte à bijoux dorée, sertie de petits rubis. C'était un bel objet qui avait le mérite d'attirer moins l'attention qu'un collier ou un tout autre bijou.

Satisfait, le marquis retourna à l'hôtel particulier et fit déposer ses achats dans sa chambre. La chaleur était étouffante à Florence, aussi Rodrigue décida de prendre un bain avant d'aller rendre visite à Lucia pour offrir ses présents. Au bout d'une heure il quitta sa chambre, ses boîtes sous le bras et avança à pas de loup dans les couloirs, n'ayant guère envie de se retrouver nez à nez avec une domestique. Arrivé devant la porte des appartements de Lucia, il toqua doucement. Rodrigue espérait ardemment la voir ouvrir, ne l'ayant que trop peu vue en tête à tête ces derniers temps.
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Message par Lucia de Liancy Dim 1 Mai - 21:04

Elle avait imaginé que Florence se trouvait bien plus près que cela de la côte. Elle qui avait l'habitude de passer d'un côté à l'autre de l'île en quelques heures fut on ne peut plus surprise de voir les heures défiler sans que la ville tant attendue ne fasse surface. Dès qu'une pause était annoncée, elle sautait de la voiture avec entrain, espérant qu'il s'agissait de la destination finale. Mais à chaque fois, ses espoirs étaient vains et il repartaient pour encore plusieurs heures à se faire secouer sur les chemins italiens. Et pourtant, rien ne pouvait entacher sa bonne humeur aujourd'hui ! Elle arriverait tard, fatiguée, fourbue, mais peu importe. Elle serait au Paradis du Tissus, et il n'y avait pas meilleur rêve au monde. Bien que si. Il y avait le rêve d'être au Paradis des soieries avec Rodrigue. Autant dire qu'il serait pratiquement impossible de lui ôter le sourire qu'elle avait sur le bout des lèvres depuis qu'elle avait posé le pied sur le sol du continent.

Elle fut malgré tout des plus ravie d'atteindre enfin la ville tant espérée. Si elle avait pu admirer les paysages italiens jusqu'à la tombée de la nuit, à cette heure elle n'aspirait plus qu'à trouver des couvertures dans lesquelles s'enrouler pour s'endormir profondément jusqu'au lendemain. D'autant plus que son lendemain serait chargé, puisqu'elle allait devoir rencontrer Stefan et parler chiffons, mais surtout argent. La nuit fut de courte durée, mais elle se sentait prête à accomplir de grandes choses. Elle arriva parée de ses plus beaux atours sur le pied de guerre. Evidemment, avant de partir à son rendez-vous, elle tendit gracieusement la main à Rodrigue afin que ce dernier y dépose un baiser. Il s'agissait bien là de la seule marque d'affection qu'ils pouvaient se porter en public, alors elle ne s'en privait pas. Au terme de quatre jours de négociations, elle conclut enfin un contrat qui semblait alléchant pour les deux parties. De retour à l'hôtel, en soirée, elle brandit victorieusement devant le nez du marquis le vélin sur lequel le contrat avait été couché. Que de premières réussies pour la Casari ces derniers jours. Sa première conduite de bateau. Sa première sortie. Son premier contrat. Au fond, elle n'espérait plus qu'une seule première fois pour être pleinement comblée...

Le lendemain, ce n'était pas son habitude, mais elle larva dans son lit jusqu’aux alentours de midi. Elle était certes fière de tout ce qu'elle avait accompli depuis quelques jours, mais cela n'en avait pas été moins fatiguant. Les hommes étaient peut être plus habitués à subir toutes ces pressions à force d'exercer, mais elle, elle avait été sous tension pendant tellement de temps qu'il fallait qu'elle se détende. Et elle n'avait rien trouvé de mieux pour cela que de rester au lit. Lorsqu'elle se décida à se lever, elle passa encore des heures à se pomponner, parce qu'elle avait envie de prendre soin d'elle aujourd'hui, même si la journée était déjà bien entamée. Elle ne verrait peut être personne de la journée, elle n'aurait personne à qui montrer toute l'attention qu'elle avait mis dans sa coiffure, son maquillage et sa tenue, mais qu'importe. Tout ceci fait, elle s'assit dans un siège près de la fenêtre et se plongea dans la lecture entre deux œillades vers l'extérieur. Les heures passèrent sans qu'elle ne s'en rende compte, et elle fut sortie de son ouvrage par une personne qui venait de toquer à la porte. Doucement elle referma son livre, frotta ses jupons pour qu'ils n'aient pas l'air froissés, et alla tout naturellement ouvrir la porte.


-Marquis ! dit-elle dans un délicat sourire, sans même remarquer les paquets qu'il portait et avant de se mettre légèrement de côté pour le laisser entrer. Entrez je vous en pries ! Que me vaut le plaisir de votre délicieuse visite ?

Elle referma la porte derrière le marquis et revint se placer devant lui, l'invitant à s'asseoir sur l'un des sièges s'il le désirait. C'est alors qu'il lui montra les paquets, en spécifiant que le plus gros était un présent de la part de son père, pour la féliciter du contrat qu'elle avait conclut la veille, et que le plus petit était de lui, plus ou moins pour les mêmes raisons. Enthousiasmée par tant d'attention, la jeune femme ne savait même pas par lequel commencer. Elle jeta un oeil sur la plus grosse des boîtes et laissa planer le suspens quelques secondes avant de dire, avec l'air d'un détective qui vient de dénouer une histoire complexe :

-Je suis sure qu'il s'agit d'une robe dans celui-ci. Fit-elle en ouvrant le paquet. Et je puis même affirmer que ce n'est point mon père qui l'a choisie ! Conclut-elle en riant, connaissant les goûts en matière de vêtements de son père. Je ne puis que vous remercier de l'avoir aidé dans cette tâche Votre Magnificence. Elle est superbe !

Son regard se posa ensuite sur le second cadeau, celui qui avait encore plus d'importance à ses yeux. Mais avant de l'ouvrir, elle fit une légère moue.

-Cela fait deux fois que vous m'offrez des cadeaux sans que je ne vous en ai offert moi même... Et je ne puis guère remédier à cela à mon grand damne. Je suis point autorisée à subtiliser les florins dans la fortune des Casari.

Elle était sincèrement désolée de ne rien pouvoir lui offrir. Soudainement, elle comprit pourquoi toutes les femmes se piquaient les doigts à longueur de journée. Elles avaient au moins des mouchoirs brodés à offrir. Elle, n'avait que son beau visage et sa culture à offrir. Deux cadeaux difficilement tangibles... Elle haussa les épaules, se disant qu'elle trouverait bien une solution pour lui rendre la pareille, et elle ouvrit le second paquet, du quel elle sortit une magnifique petite boîte à bijoux. Ses yeux étaient au moins aussi brillants que les rubis qui ornaient le couvercle. Elle était tellement habituée à recevoir des robes, toutes plus belles les unes que les autres, que d'avoir cette boîte entre les mains la laissait presque sans voix. Pourtant, il fallait le remercier, et en français qui plus est :

-Oh... Elle est... Vraiment très belle Marquis. Vous avez beaucoup de goût pour choisir ! Et comme si parler lui avait redonné tout son aplomb, elle ajouta : Vous n'avez plus qu'à offrir à moi les bijoux pour aller dans l'intérieur maintenant !

Elle perdait pas le nord l'italienne ! Elle posa la magnifique boîte sur le bord du secrétaire et s'approcha au plus près du Liancy pour s'acquitter d'une légère courbette de remerciement après cette petite plaisanterie de bon goût.
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Message par Rodrigue de Liancy Dim 1 Mai - 22:41

Durant l'ouverture des paquets, Rodrigue était resté debout et s'était fait mystérieusement silencieux. Il attendait le verdict final pour faire un quelconque commentaire aux remarques judicieuses de la Casari. Pour le moment, il se contentait d'observer attentivement ses gestes délicats, gracieux, et d'admirer son regard s'illuminer devant le tissus de la robe ou les pierres de la petite boîte à bijoux. Lucia avait raison, il la gâtait et peut-être plus que la raison ne le permettait. Toutefois, le marquis éprouvait une certaine satisfaction quand il découvrait l'enthousiasme ou l'émerveillement chez la brune qui avait l'air pourtant si peu impressionnable. Lucia était la fille unique de l'un des plus riches marchands de Giglio, ce qui lui permettait d'obtenir pratiquement tout ce qu'elle souhaitait depuis sa plus tendre enfance, mais elle n'était pas blasée. Elle savait apprécier une robe, l'ouvrage d'un joaillier, la beauté d'une mer qu'elle avait vu depuis toujours, avec cette mine enchantée que tant d'autres à sa place auraient perdu depuis longtemps.

La légère courbette le fit sourire, bien que quelque chose lui déplaisait dans ce geste venant de Lucia, comme s'il avait du mal à accepter cette différence de rang. Elle existait pourtant et les « Marquis » et autres « Votre Magnificence » le lui rappelaient assez régulièrement. En privé, ne pouvait-on pas remettre au placard ces formules de politesse ? Combien de lieues avaient-ils parcouru au cours de leurs promenades, côte à côte et bien souvent proches de s'embrasser ? De nouveau ils étaient très près l'un de l'autre et Rodrigue la toisait avec un regard doux. Il fit encore un pas devant lui et lentement prit le menton de Lucia entre son index et son pouce pour incliner légèrement sa tête et la regarder dans les yeux.

- Je ne vous offre pas de cadeaux pour que vous m'en offriez en retour. Je vous les offre parce que vous les méritez et parce que cela me plaît…

Le Liancy suspendit sa phrase. Il la regardait toujours, et se remémorait toutes les fois où il aurait pu l'embrasser avant de finalement se raviser pour attendre le moment opportun. Ils y étaient. Seuls, bien loin des regards indiscrets, dans une ville magnifique qui leur faisait oublier l'existence même de Giglio. Dans une caresse la main qui retenait le menton de Lucia vint se loger sur son cou avant que Rodrigue n'inclinât sa tête vers l'avant, frôlant les lèvres de la belle Casari qu'il finit par embrasser doucement. Les secondes s'écoulèrent mais il continuait de l'embrasser, avec une tendresse qui le surprenait lui-même. Son bras libre était venu s'enrouler autour de la taille de la jeune femme qu'il serrait maintenant contre lui. Ses lèvres glissèrent alors dans son cou, comme elle l'avait fait quelques jours auparavant sur le pont du bateau. Il y déposa une grappe de baisers avant de revenir à ses lèvres qu'il embrassa de nouveau avec chaleur. Enfin il colla son front contre le sien pour la regarder tout en restant très proche d'elle.

Rodrigue ne savait pas quoi dire. Il avait perdu l'usage de la parole, perturbé lui-même par l'intensité du baiser qu'il venait d'offrir. Il y avait quelque chose d'étrange dans sa propre attitude vis à vis de Lucia. Jusqu'à présent il avait ressenti de l'attirance pour la brune, puis une certaine affection, mais ce qui venait de se passer était animé par quelque chose de plus fort que la simple affection. Il n'en montrait rien, mais il prenait presque peur. Peur de comprendre que ce quelque chose de plus fort était un sentiment qu'il avait déjà connu, mais qui lui avait fait tant de mal.

Il continuait de regarder Lucia, se demandant ce qu'elle ressentait. Elle avait joué avec lui durant toutes ces semaines, peut-être allait-elle finalement le rejeter. Au fond de lui le Liancy n'espérait pourtant qu'une chose : être embrassé en retour. Ce baiser avait réveillé en lui ce manque d'affection qui rendait ses jours parfois moroses alors qu'il avait tout pour lui à Giglio. Tout, sauf des amis, tout, sauf une compagne. La Casari était ce qui se rapprochait le plus de l'amie, mais aussi de la compagne. Oui, il voulait être embrassé et embrasser à nouveau pour comprendre ce qui était en train de se jouer dans sa tête, mais surtout dans son cœur.
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Message par Lucia de Liancy Mar 3 Mai - 15:39

N'émettant aucune résistance lorsqu'il la contraint à le regarder dans les yeux, la jeune femme prit même un malin plaisir à le défier du regard, comme pour lui dire qu'il ne serait pas capable de l'embrasser cette fois encore. Si au début elle se pliait à cet exercice -qu'elle appréciait au demeurant- avec pour seule conviction de le traîner dans ses filets... Le marquis s'était tellement bien pris au jeu qu'il avait lui même profité de ses atouts. Ainsi, au fur et à mesure des jours, chacun enfonçant toujours un peu plus son doigt dans l'engrenage, leur jeu était devenu presque une drogue dont ils n'arrivaient plus à se passer. Face à ce constat accablant, la Casari essayait tant bien que mal de se voiler la face, se persuadant que ce qu'elle était en train de vivre n'était pas un amour naissant, mais un simple "enthousiasme démesuré". Pourtant, au fond, elle savait qu'en ayant tout fait pour essayer de faire naître des sentiments dans le coeur du marquis, elle avait fini par les faire naître dans le sien.

Elle joua. Elle perdit. Elle l'avait défié. Il avait relevé le défi. Si d'habitude il s'amusait à la frôler, lui faisait juste croire qu'il était prêt à déposer ses lèvres sur les siennes sans vraiment le faire, cette fois il n'avait pas fait semblant. Elle ne connaissait pas la signification de ce baiser pour Rodrigue. Elle ne savait pas s'il s'agissait là d'une ultime provocation dans leurs jeux de séduction ou s'il reflétait ce qu'il ressentait à son égard. A la fois gênée par la douceur du baiser et étreinte par un sentiment de victoire, la Casari ne savait même pas comment réagir face à cette situation à laquelle il fallait s'attendre, mais qu'elle n'avait pas du tout prévue. Finalement, son corps décida pour elle de la marche à suivre et lui fit fermer les yeux et bouger légèrement la tête en accord avec le chemin suivi par les baisers du Liancy. Détendue, n'essayant plus de savoir s'il profitait de son statut de marquis ou non, elle profita de l'instant comme s'il lui offrait le lot de consolation pour ne pas avoir acheté le collier qu'elle aurait pu ranger dans sa boîte sertie de rubis.

Malheureusement, ce n'était pas un cadeau que l'on pouvait conserver à l'infini, et les lèvres du Liancy s'éloignèrent, tandis que son front venait se poser contre le sien. Elle rouvrit lentement les yeux et n'osa même pas, pour la première fois, plonger son regard dans celui du marquis. Elle savait qu'à cet instant, ses yeux ne reflétaient rien de plus que ce qu'elle essayait de se cacher et bien évidemment de lui cacher également. Elle ne voulait pas qu'il la voit faible à cause du simple baiser après lequel elle courait depuis toutes ces semaines. Ce fut donc les yeux rivés vers le bas qu'elle prit quelques secondes pour se remettre de ses émotions et surtout pour retrouver la capacité à le défier. S'il l'avait embrassée, c'est qu'il aimait être défié, il était donc hors de question d'abandonner cette façon d'être maintenant qu'elle avait, peut être, obtenu ce qu'elle voulait, et peut être même plus...

Elle s'éloigna enfin d'un pas, et bien qu'un peu fébrile, elle pensait avoir récupéré suffisamment de moyens pour prononcer quelques mots, qui ne sauraient que trop rappeler au marquis leur véritable premier "tête-à-tête". Son visage se fit alors antinomique, ses yeux cherchant encore à le charmer, tandis que sa bouche appelait irrésistiblement celle du marquis à recommencer ce qu'il venait de faire. Elle tendit le dos de sa main avec une certaine nonchalance et ajouta, l'émotion bien perceptible dans le timbre :


-Il y a trois semaines j'aurai répondu à ce baiser sans même y songer mais.... aujourd'hui, la situation est... Le ton se fit plus bas bien malgré elle, différente...

Et c'était le cas, elle ne l'appréciait certainement pas comme au premier jour... Et finalement, ses yeux charmeurs se transformèrent en un appel afin qu'il recommence. Quelle conviction ! Franchement...
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Message par Rodrigue de Liancy Mar 3 Mai - 21:02

Rodrigue resta interdit deux secondes en entendant Lucia. Cela ressemblait à un rejet, mais le Liancy scrutait surtout ses yeux. Les mots pouvaient mentir, pas le regard. Le marquis la fixa intensément, silencieux, laissant planer le doute pendant quelques secondes sur ce qu'il allait faire. Et enfin, un léger sourire au coin de ses lèvres et un seul mot, en français :

- Vraiment ?

Sans plus tarder il passa à nouveau un bras autour de sa taille pour l'attirer contre lui et l'embrassa fougueusement. Un baiser long, passionné aussi intense que les battements de son cœur qui était joyeusement en train de s'emballer. Puis le retour à la réalité, et délicatement Rodrigue recula, attirant Lucia avec lui. Il prit place sur la chaise qu'elle lui avait proposé un peu plus tôt et l'invita sur ses genoux, son bras fermement arrimé à sa taille. Trois semaines auparavant, il aurait sûrement tenté d'aller plus loin que les baisers. Ils étaient seuls, les domestiques devaient être en train de faire leur sieste et ils se trouvaient dans la chambre de la Casari, n'était-ce pas une magnifique occasion ? Et pourtant, le marquis n'avait maintenant aucune intention de ce genre, comme s'il avait enfin compris que son rang ne lui permettait pas de se vautrer dans un lit avec la fille d'un des notables les plus importants de l'île.

Non, il préférait la valse des baisers qu'il s'appliquait à offrir à Lucia. Chaque baiser était différent, comme tous les sentiments qui se bousculaient dans la tête de Rodrigue. Sensuels, tendres, fougueux, délicats, le Liancy l'embrassait en suivant son cœur. De temps en temps il couvrait son cou de baisers, lui permettant ainsi d'échapper à son regard. Astride était de l'histoire ancienne, et il s'était juré d'aller de l'avant. Mais pouvait-il retomber amoureux si vite ? Devait-il se laisser entraîner dans une relation avec Lucia, alors qu'ils s'entendaient si bien jusqu'à présent ? C'était risquer de perdre sa seule amie. Et pourtant, il ne se résignait pas à interrompre ce moment. Rodrigue voulait rester avec elle aussi longtemps que possible. Quand allaient-ils avoir de nouveau l'opportunité de se retrouver seuls, loin des yeux curieux des domestiques ?

Les baisers s’enchaînaient, entrecoupés d'instants durant lesquels il se plongeait dans son regard de braise. Et taquin, il faisait ensuite courir ses lèvres sur sa peau jusqu'à pouvoir mordiller doucement son oreille. Mais il en revenait toujours à sa bouche, qu'il embrassait avec délice, parfois en caressant légèrement son visage du bout des doigts.


- Vous êtes si belle, Lucia, finit-il par souffler en français.

C'était là tout ce qu'il était capable de lui dire. Il ne pouvait pas lui dire qu'il l'aimait, il n'en était pas certain. Il ne pouvait pas lui dire qu'il la désirait, cela ne se faisait pas. Il ne pouvait pas lui dire qu'il voulait la garder dans ses bras durant des heures, cela pouvait l'effrayer. Et c'était là tout son drame, au-delà des baisers, qu'étaient-ils l'un pour l'autre ? Rodrigue était incapable de définir  ses propres sentiments, incapable de savoir s'il lui plaisait réellement ou si son rang de marquis lui conférait un attrait qu'il n'avait pas naturellement. Il était trop tôt pour le savoir sûrement.

L'heure était pour le moment à la séparation. Le Liancy aurait aimé prolonger chaque baiser, chaque caresse qu'il faisait sur sa joue, continuer à ressentir une multitude de frissons, mais il ne savait que trop bien que tout cela pouvait prendre une tournure dangereuse.


- Je vais devoir vous laisser, même si je le regrette déjà amèrement. Rodrigue lui sourit tendrement, sincèrement déçu de constater que le temps filait bien trop vite. Mais j'espère que vous accepterez de partir à la découverte de Florence avec moi demain, et les jours qui suivront.

Rodrigue l'embrassa à nouveau, langoureusement, dernier baiser sans savoir quand allait suivre le prochain, dernier baiser montrant à quel point sa compagnie lui était importante. Il se trahissait auprès d'elle, mais n'était-ce pas là le seul moyen de savoir quel sentiment les animait l'un et l'autre ?
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Message par Lucia de Liancy Mer 4 Mai - 15:02

Trahie par ses prunelles, elle ne fut pourtant pas mécontente de son sort. Elle se laissait emmener au gré des baisers du marquis, s'imaginant que le Paradis ne pouvait certainement pas être mieux que ce qu'elle était en train de vivre en ce moment même. Parfois sauvage comme un lion et parfois doux comme un agneau, la jeune femme ne boudait pas son plaisir, profitant de chacune des facettes du Liancy avec le même désir. Elle aimait tout chez lui. Ses cheveux, ses caractères, son accent français lorsqu'il parlait italien, même son cache-oeil trouvait grâce à ses yeux. Le titre venait d'être relégué au second plan, car s'il lui avait été permis de le rencontrer sans qu'il soit marquis, elle serait probablement tombée sur le charme également. Elle aurait simplement essayé de se le cacher encore un peu plus longtemps. Petit à petit, prenant conscience qu'il n'était plus question du défi qu'elle lui avait encore lancé mais d'autre chose, ses doigts fins s'approchèrent de son visage, de ses cheveux, de son cou, de tout ce qui pouvait recevoir les douces caresses qu'elle voulait offrir. Mais tout moment, aussi bien soit-il, avait une fin. Et après lui avoir dit qu'elle était belle sur un ton qui ne ressemblait pas à celui qu'il employait habituellement, il ajouta qu'il était l'heure de se séparer. Elle retint une moue de déception et se redressa pour lui permettre de se lever.

-Et pourquoi n'accepterais-je point ? Devrait-il y avoir quelque chose de changé par rapport à Giglio Marq...

Pas le temps de lui rappeler une énième fois qu'il était marquis, il l'embrassa une dernière fois, comme pour lui signifier qu'elle devait arrêter de montrer leur différence de rang. Elle lui sourit comme elle avait l'habitude de le faire à chaque fois qu'ils se quittaient et elle resta plantée au milieu de sa chambre jusqu'à entendre le claquement de la porte. De là, elle attendit encore quelques secondes avant de sauter dans son lit en faisait des petits cris ridicules et de se rouler dans sa couverture en en gardant une partie dans les bras. Les yeux pleins d'étoiles rivés sur le plafond elle se parlait à elle même à haute voix :

-Il m'aime ! Non... Pas possible ! Mais ! Tu as vu comment il m'embrassait ? Il m'aime ? Il a profité de moi ? Non ! Il m'aime ! Non ? Il était si passionné... Pourquoi ? Pourquoi ne m'aimerait-il pas ? Tu en penses quoi toi ?

Elle tourna la tête de côté dans l'espoir de croiser le regard de son amie Giulia, toujours là pour lui couper la parole quand elle en avait besoin, mais cette fois il n'y avait personne, et elle allait passer des heures entières à ruminer tout ce qui venait de se passer, jusqu'à s'endormir de fatigue. Elle se réveilla le lendemain sans savoir comment elle allait réagir face au Marquis aujourd'hui. Rester naturelle ? Ça semblait être la meilleure option qui se présentait à elle. Alors elle se coiffa et s'habilla comme d'habitude et rejoint Rodrigue dans l'un des salons de l'hôtel. Et avant de partir pour leur promenade, elle dit avec malice et en français afin que le moins de personne possible puisse les comprendre :

-J'ai un jeu pour vous ! Vous ne connaissez personne, je ne connais personne. A Giglio, nous devons nous cacher, mais ici, nous n'avons pas de raison pour faire cela n'est-ce pas ? En plus ici, vous êtes pas marquis, vous êtes un drôle de personnage avec des cheveux orange !

Et elle ne croyait pas si bien dire. Si elle s'ôtait une belle épine du pied avec cette proposition, car jouer au faux vrai couple avait quelque chose d'amusant et même de reposant parce qu'ils n'avaient pas besoin de se soucier du regard de ceux qu'ils croisaient, les ruelles de Florence n'avaient rien de comparable avec celles de Giglio. Sur l'île, les magouilles allaient certes bon train, mais l'atmosphère y était bien moins pesante qu'ici. Sur chaque place, la jeune femme se serrait toujours un peu plus contre Rodrigue, de peur d'approcher de trop près un florentin. Elle ne s'était jamais sentie si peu en confiance, et malgré la beauté des échoppes devant lesquelles ils passaient, elle finit, au bout de quelques jours, par demander au Liancy la possibilité d'aller faire leurs promenades dans les campagnes aux alentours de Florence. La fin de leur voyage se déroula sous de biens meilleurs hospices à partir de cet instant, et les liens entre les deux gigliesi continuèrent à se renforcer jusqu'à ce que sonne l'heure de la fin de leur voyage. Avant d'embarquer dans la voiture qui la reconduirait au port, elle tendit le dos de sa main au marquis avec un léger sourire, comme s'il était temps de remettre une certaine distance entre eux maintenant qu'ils retournaient chez eux. Baisemain reçu, elle prit place et le convoi put quitter la vie florentine. Une chose était certaine, elle n'avait aucune envie d'y remettre les pieds, même pour toutes les soieries du monde, alors elle était bien heureuse que les négociations avec le fils du cousin de son père aient réussi, elle s'assurait des tissus de bonne qualité, à domicile. Ils arrivèrent à la ville portuaire en début de soirée, et il leur fut annoncé qu'ils devraient y passer la nuit, les flots étant bien trop agités pour partir à cette heure. Ravie de rester sur le continent une nuit de plus, qui plus est loin de cette ville étrange qu'était Florence, la jeune femme invita donc le marquis pour une petite balade sur le bord des quais avant la tombée de la nuit.

Puis le soleil se leva, comme chaque matin, et les gigliesi purent tous monter à bord du navire qui allaient les ramener sur leur île. Malgré tous ces contrats conclus, tous avaient hâte de retrouver leurs familles, leurs amis, et surtout leur petite ville paisible ! En plus de tout cela, la Casari avait une autre petite satisfaction personnelle à rentrer : voir la tête des soeurs Massari.
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Message par Rodrigue de Liancy Ven 6 Mai - 15:15

Depuis leur retour à Giglio, Rodrigue et Lucia n'avaient presque pas eu l'occasion de se voir. Chaque rencontre était l'affaire d'une poignée de minutes durant lesquelles ils essayaient de se dissimuler pour échanger quelques baisers. L'affection de Rodrigue pour Lucia s'était progressivement transformée en amour durant leur séjour à Florence. Le marquis s'était en revanche gardé d'exprimer clairement ses sentiments à la Casari, faute de les assumer totalement lui-même. Il était heureux avec elle, et jusqu'à présent il avait fait en sorte de se poser le moins de questions possibles. Le Liancy avait déjà eu du mal à admettre qu'il était amoureux alors que c'était une évidence. Il avait déjà ressenti cela auparavant, et c'était là une partie de son problème. Alors pour éviter de nuire à son propre bonheur, il repoussait chaque question qui germait dans son esprit, se disant qu'il y réfléchirait plus tard, un jour. Rodrigue savait pourtant qu'il ne pouvait pas retarder indéfiniment l'inévitable : il allait devoir faire un choix.

Pour le moment, il était bien trop occupé avec la multitude de rencontres qui étaient à son programme. Le lendemain de son arrivée il avait rencontré Arambour, puis des notables, puis, les jours suivants, encore d'autres notables, il avait également dû rendre la justice dans un litige opposant deux petits pêcheurs qui se disputaient un cabanon non loin du port, prétextant l'un et l'autre qu'il leur appartenait. Blasé, le marquis s'était contenté de leur sourire légèrement et de leur  intimer de trouver une solution entre eux sinon il les enverrait aux cachots pour un mois afin qu'ils réfléchissent au temps qu'ils venaient de lui faire perdre. Penauds, les deux hommes étaient repartis comme ils étaient venus, au grand plaisir de Rodrigue qui se disait que cette séance de justice était bien moins pénible encore que ce qu'il allait subir le lendemain.

En effet, il recevait au château tous les notables de l'île pour une réunion similaire à celle qui l'avait consacré marquis. A l'ordre du jour, la défense de Giglio. Arambour y était également conviée, moment parfait pour officialiser sa nomination en tant que « Capitaine ». Malheureusement pour Rodrigue, les notables avaient un autre sujet à évoquer avant la défense. Magnanime et toujours prêt à la discussion, il les laissa s'exprimer. Grossière erreur. Une partie des notables, dont Massari et Guantieri, s'interrogeaient sur l'engagement qu'avait pris le marquis auprès d'eux, à savoir de prendre une habitante de l'île pour épouse afin d'avoir rapidement un héritier pour pérenniser sa lignée et donc la stabilité de Giglio. Or ils ne voyaient pas le moindre avancement à ce sujet. Rodrigue fronça les sourcils et fixa Massari. Il était évident qu'il souhaitait lui mettre la pression, d'autant qu'il devait savoir que le marquis se baladait avec ses filles et qu'il allait encore être de promenade avec elles après la réunion. Le Liancy n'avait aucune envie d'aborder ce sujet ce jour, se sentant légitimement sur une pente très glissante. Il se contenta alors de répondre courtoisement mais fermement qu'il avait eu d'autres priorités, que celle du jour était la défense et qu'il était inutile d'avoir un héritier si l'on était incapable de protéger ce qui allait lui revenir de plein droit. La discussion était close, et il passa à l'ordre du jour. Néanmoins, Rodrigue restait agacé et venait de comprendre que les notables allaient faire pression sur lui et s'immiscer, si besoin, dans sa vie personnelle.

La réunion terminée, Rodrigue retrouva Paola et Flavia Massari pour partir en balade. Le marquis le faisait sans aucun enthousiasme, juste parce qu'il était de son devoir de fréquenter le beau monde de Giglio. « Beau monde » était pourtant difficilement applicable aux sœurs Massari. Il ne les aimait guère car affreuses tant intellectuellement que physiquement. Comme il était dur de passer de la magnifique Lucia et de son sourire enchanteur, à Paola et son nez proéminent qui prenait toute la place sur un visage déjà peu engageant, et à Flavia qui tentait tant bien que mal de dissimuler sa claudication avec de longues jupes et des chaussures spécialement adaptées. Et leur père croyait vraiment qu'il tomberait sous le charme de l'une d'entre elles ? Folie. Sa femme ne serait ni laide, ni boiteuse.
Alors que les Massari jacassaient sans fin – comme toujours -, Rodrigue pensait à Lucia. Comme il aurait tant aimé être avec elle à cet instant. Abrités sous un pin, il aurait passé ses bras autour de sa taille et l'aurait couverte de baisers. Au lieu de ça, il avait les bras pris par deux poules qui cherchaient éhontément à finir dans son lit. Elles n'étaient pas subtiles, voire totalement vulgaires.


- Quel dommage Marquis que l'on ne peut épouser qu'une personne, fit Paola en se serrant contre le Liancy.
- Oui ! Si vous épousez l'une de nous deux, l'autre va être jalouse. Alors que si vous nous épousiez toutes les deux, vous auriez deux fois plus d'héritiers, renchérit Flavia en imitant sa sœur.

Rodrigue les regarda, surpris par un tel concentré de stupidités. Jusqu'à présent il les méprisait, maintenant il les avait en sainte horreur.

- Vous savez très bien que cela ne fonctionne pas ainsi, répondit-il tout simplement.
- Mais vous êtes marquis ! Vous pouvez changer la loi, n'est-ce pas ? demanda Paola avec un regard qui se voulait sensuel mais qui était aussi beau que celui d'un pigeon malade.
- Non, je ne le peux. Et même si je le pouvais, je ne le ferais pas. Avoir plusieurs épouses ne m'intéresse pas le moins du monde.

Rodrigue essaya de s'écarter un peu de ses compagnes de promenade. Elles l'étouffaient avec leurs questions et leurs manières impolies. Ils reprirent donc leur balade, mais les deux jeunes femmes semblaient avoir été calmées pour la journée, ce qui permit au marquis de prendre congé un peu plus tôt, prétextant qu'une masse énorme de travail l'attendait. En réalité, il avait tant travaillé les jours précédents, qu'il ne lui restait que quelques petites affaires sans intérêt et qui aurait pu être traitées un peu plus tard. Cependant le Liancy ressentait le besoin d'être seul et de ne plus voir personne jusqu'à la fin de journée.

Hélas, même dans son bureau il fut dérangé à trois reprises par Guido qu'il congédia sèchement en lui disant qu'il avait eu une rude journée et qu'il n'était disponible pour rien jusqu'au lendemain. Dehors le soleil déclinait lentement, et Rodrigue comprit qu'il n'allait rien faire de bon, ni d'utile en étant de si mauvaise humeur. Il décida donc de quitter son bureau et de tout bonnement aller se coucher.

Dans son lit, il ne trouvait pas le sommeil. Le rouquin pensait à Lucia, aux Massari, père et filles, à ce mariage qu'on attendait de lui, mais aussi à Astride. En fait, son problème pouvait surtout se résumer à quatre termes : Giglio – Lucia – Mariage – Astride. Sachant très bien qu'il ne trouverait pas le sommeil tant qu'il n'avait pas les idées claires, il s'assit dans son lit et décida de réfléchir méthodiquement.
Giglio attendait une Marquise et un héritier. Il en allait de la stabilité de l'île et les notables ne cesseraient de mettre en avant leur progéniture aussi longtemps qu'il repousserait la question d'un mariage. Toutefois, bien que ce mariage fut un devoir, Rodrigue refusait d'épouser une jeune femme qui lui déplaisait. Cela tombait plutôt bien car il était tombé amoureux de Lucia. Le jeune homme était lucide, elle pouvait faire une excellente épouse. Ils s'entendaient parfaitement, aucune dispute n'ayant été à déplorer pour le moment, et il s'était même surpris à être attendri en voyant Lucia accompagnée de la petite Hélène Licors. Lui qui auparavant ne désirait pas forcément devenir père, avait subitement imaginé avoir une descendance avec Lucia.
Malheureusement, le spectre de ses fiançailles ratées avec Astride planait toujours. Il pouvait demander Lucia en mariage, et il en avait envie car aucune autre femme à Giglio ne lui arrivait à la cheville, mais n'était-ce pas trop tôt ? Cela faisait à peine six mois qu'il avait quitté la Vellini et il avait quelques scrupules à l'idée de rayer cette histoire passionnée avec un mariage avec une autre dans la même année. Mais ça, les notables s'en fichaient. Ils ne connaissaient pas Astride, ils n'avaient jamais entendu parler de cette fiancée que Rodrigue aimait encore tout en sachant que leur amour était vain. Alors qu'avec Lucia, tout était possible. La Casari le rendait heureux et lui faisait totalement oublier l'échec de sa toute première histoire d'amour. Alors, pourquoi attendre ?

« Pourquoi attendre ? » Rodrigue se répétait la question en boucle. Qui sait, peut-être que Lucia n'attendait que cela, qu'il se déclarât ouvertement, et qu'il la demandât en mariage. Attendre encore, c'était risquer de la perdre, risquer de perdre la seule femme qui lui plaisait à Giglio.
Le Liancy quitta soudainement son lit et s'habilla. Il voulait régler cette question, maintenant. Il n'était pas si tard, il ne faisait nuit que depuis une heure, voire deux. Les couloirs du second étage seraient déserts à cette heure. Déterminé, il prit une bougie et quitta ses quartiers.

Arrivé devant la porte de la suite occupée par Lucia, Rodrigue toqua quelques coups. Il ne savait pas si elle dormait encore et s'excuserait platement s'il l'avait réveillée. Il retoqua encore deux fois et dit :


- Lucia, c'est Rodrigue. Je dois vous parler, c'est important.

Heureusement pour lui, il n'y avait que la Casari dans cette aile du château, il pouvait donc parler normalement sans attirer l'attention. Impatient, il regardait la poignée de la porte, espérant vivement la voir bouger et s'ouvrir sur l'élue de son cœur.
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Message par Lucia de Liancy Ven 6 Mai - 16:09

Elle le voyait peu, mais elle savait qu'il avait les affaires honteusement laissées par Guido à traiter. Alors elle ne lui en voulait pas, d'autant qu'il lui avait attribué sa première mission d'importance : s'occuper de la fille de la capitaine. Elle devait en faire une vraie petite gigliesi en lui apprenant les bonnes manières italiennes, la langue et tout ce qui pourrait lui servir plus tard. N'ayant jamais eu de petit frère ou de petite soeur, la jeune femme était ravie de pouvoir s'occuper d'une petite poupée comme Hélène. Elle n'appréciait certes pas tout le temps que passait la mère de la dite Hélène avec son marquis, mais elle faisait quand même bonne figure en se persuadant qu'il ne pouvait strictement rien se passer entre eux malgré la beauté manifeste de la bourguignonne. En fait, ce qui la faisait réellement rager intérieurement, c'était que la Démesquine possédait ce que la Casari aurait absolument voulu avoir : le teint pâle. Si bien que, de temps en temps, au détour d'une conversation sur les chiffons et la façon de se tenir à table, elle demandait à la petite Licors si elle savait ce qu'il se passait entre sa mère et le Liancy. La réponse était très souvent : "Mère n'aime personne. En plus Monsieur de Liancy lui a fait mal à la joue.". Ravie, Lucia reprenait le fil de la discussion comme si de rien n'était. Lorsqu'elle n'était pas avec Hélène, elle perfectionnait son français, ou rendait visite à Giulia pour se tenir au courant des derniers potins de Giglio Porto. C'est ainsi qu'elle apprit que Roméo avait été promis à une femme du continent qui débarquerait dans les semaines à venir sur l'île. Un petit rire s'était échappé de la bouche de la Casari lorsqu'elle entendit la description de la future épouse Ferrero. Un petit vénard...!

Aujourd'hui, elle n'avait pas vu le marquis du tout, trop occupé sans doute. Elle était un peu déçue, mais loin d'être triste. Elle tentait de voir le côté positif en imaginant qu'elle le verrait le lendemain et que, pour se faire pardonner de ne lui avoir même pas baisé la main la veille, il allait s'étendre en baisers jusqu'à ce qu'elle accepte ses excuses. Elle en abusait toujours, mais comment y résister ? Il y mettait tant d'attention, de tendresse, de délicatesse, qu'elle ne pouvait que fondre et se laisser envahir par un profond sentiment de bien être et d'amour. Depuis leur retour de Florence, elle avait en effet avec des petits papillons dans le ventre, et des étoiles dans les yeux dès qu'elle l'apercevait. La couronne n'avait plus aucun intérêt à ses yeux, c'était lui qu'elle voulait. Et s'il lui disait "je vous aime, enfuyons-nous", elle s'enfuirait avec lui quitte à vivre de guenilles jusqu'à la fin de ses jours. Elle l'aimait, mais elle n'en disait rien, à personne. Il n'y avait bien qu'Hélène qui avait remarqué que la jeune femme était amoureuse. Les enfants avaient un don pour ce genre de chose que les adultes n'avaient pas. La Casari avait beau demander à la petite si elle pensait que le marquis l'aimait aussi, la petite lui disait qu'elle n'en savait rien parce qu'elle ne le voyait jamais. Elle se coucha donc le sourire aux lèvres, peu de temps après que le soleil se soit couché également. Elle n'aimait guère lire à la lueur de la bougie car cela la forçait à froncer les sourcils. Ce qui accélérerait l'apparition des rides sur son front !

Elle rejoignait à toute peine les bras de Morphée qu'elle entendit frapper une première fois contre sa porte. Sa seule réaction fut de se retourner dans son lit, son inconscient jugeant qu'il devait s'agir d'une domestique qui passait le balai. A cette heure. Elle entendit frapper une seconde fois et elle retrouva donc sa position initiale après un léger grommellement, comme si elle avait essayé de dire à la domestique de bien vouloir déguerpir le plancher sans y parvenir. Elle ouvrit subitement les yeux en entendant la voix de Rodrigue. Elle les referma aussitôt, considérant que cela ne pouvait être qu'un rêve, qu'elle l'imaginait parce qu'elle ne l'avait pas vu de la journée. Pourtant, elle rouvrit une dernière fois les yeux et put voir une ombre derrière la porte. Ce rêve avait l'air si vivant, qu'elle ne perdait rien à ouvrir la porte. Elle se redressa lentement dans son lit, posa ses pieds nus sur le plancher et se mit en marche vers la porte. Dieu qu'elle était loin ! Elle semblait pourtant si près lorsqu'elle était parfaitement éveillée. Les yeux encore clignotant, elle finit par poser sa main sur la poignée et ouvrit doucement la porte pour tomber nez à nez avec le Liancy. D'abord sans aucune réaction, elle haussa finalement les deux sourcils pour essayer de garder ses yeux ouverts. Il était bien là, devant elle. Ce n'était pas un rêve. Elle lui sourit et l'invita bien évidemment à entrer, lui et sa bougie. D'une voix qui se voulait encore partiellement endormie, elle dit :


-Excusez moi pour ma... tenue. Je ne pensais point vous voir si tard... Marquis. Vous aurais-je manqué pour que vous veniez me déranger à cette heure ?

Elle s'assit sur le rebord de son lit et, machinalement, l'invita à s'asseoir à côté d'elle afin d'écouter ce qui l'amenait dans ses quartiers. L'envie de la voir en tenue de nuit ? L'envie de montrer son torse à une femme oscillant entre le réveil et le sommeil ? Il était tout de même étrange ce marquis, parfois.
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Message par Rodrigue de Liancy Ven 6 Mai - 16:52

En voyant apparaître Lucia derrière la porte, Rodrigue sourit. C'était un réflexe quand il la voyait. Son cœur se mettait à faire des bonds dans sa poitrine et il souriait. Il s'en voulait un peu de la tirer du sommeil dans lequel elle était vraisemblablement plongée, mais il ne savait pas quand il allait avoir l'occasion de la revoir en toute discrétion. Alors il ne fit qu'un bref signe de la main lorsqu'elle s'excusa pour sa tenue, car la pauvre n'y était pour rien. Quand il s'installa auprès de la Casari, après avoir déposé sa bougie sur le chevet, il remarqua qu'elle restait ravissante même à peine éveillée. Maintenant qu'il était chez elle, Rodrigue hésitait sur les mots à prononcer. Il avait envie de justifier son choix, mais allait-elle l'écouter ? Pour capter son attention, il passa son bras autour de ses épaules et prit l'une de ses mains.

- Vous m'avez manqué, oui, énormément même, commença-t-il d'une voix douce chargée de dissimuler sa soudaine appréhension. Mais je ne viens pas vous déranger parce que vous me manquez.

Rodrigue avait résisté à son envie de l'embrasser. Il devait lui parler sérieusement, avec sincérité, si bien qu'il avait peur de tout gâcher en commençant par une série de baisers qui allait totalement les détourner de ce pourquoi il était venu. Il fallait pourtant se lancer, il prit donc une grande respiration et commença :

- Les notables de Giglio ont accepté que je monte sur le trône si je respectais certaines conditions. Parmi ces conditions, il y avait un mariage avec une femme de Giglio. Étant français, il était légitime pour eux de demander à ce que ma descendance soit tout de même originaire de l'île. J'ai accepté, sans vraiment me préoccuper de cette condition car, à titre personnel, j'ai toujours souhaité épouser une femme que j'aimais et non pas l'épouser car c'était un devoir.

Il marqua une pause, conscient qu'il parlait déjà un peu trop pour elle. Rodrigue se concentra alors, essayant d'abréger tout en étant assez complet pour que sa demande ne tombe pas comme un cheveu sur la soupe.

- J'ai finalement réalisé que Giglio importait plus que mes souhaits. Que mon épouse devrait être une bonne marquise avant de me plaire. Une jeune femme raffinée, intelligente, sachant se faire respecter et ayant le sens du devoir. Cette femme je l'ai trouvée. Je l'ai compris lorsque j'en suis tombé amoureux. J'ai ainsi trouvé la marquise parfaite pour Giglio, mais aussi une épouse…

Le Liancy retira son bras des épaules de Lucia et s'écarta doucement pour se lever et s'agenouiller devant elle. Cela semblait surréaliste, il en avait pleinement conscience, mais il se fichait bien de savoir à quoi ressemblait cette scène, ce qui importait, c'était l'intention. En se déplaçant, il avait gardé sa main entre les siennes et après un tendre baiser sur la peau mat, il reprit, en français cette fois :

- Lucia, ma Lucia. Je t'aime. Tendrement. Je suis heureux avec toi et j'aimerais l'être pour toujours. Alors… accepterais-tu de m'épouser et d'ainsi devenir ma magnifique marquise ?

Il avait abandonné le vouvoiement. Trop guindé, trop peu représentatif de l'amour qu'il ressentait pour cette femme. Le tutoiement à son cousin signifiait son profond mépris pour lui, mais pour Lucia, c'était la marque de sa plus profonde affection. Attentif, il scrutait son visage avec un regard amoureux et un sourire désespérément tendre. Non, aucune femme de Giglio n'était aussi belle et accomplie et aucune autre femme de Giglio ne méritait d'avoir le marquis à ses pieds.
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Message par Lucia de Liancy Ven 6 Mai - 17:35

Elle était déjà satisfaite de savoir qu'il venait la voir parce qu'elle lui avait manqué. Elle aurait pu s'en contenter, et aurait d'ailleurs aimé s'en contenter afin de pouvoir se rendormir aussi vite qu'elle venait d'être réveillée. Pourtant, le marquis ne semblait pas vouloir s'en arrêter là, et ce n'était pas la seule raison de sa venue. Alors quoi ? Son cerveau embrumé essayait de trouver une explication à cette subite envie de la visiter dans sa chambre, et voyant qu'il n'était guère entreprenant, elle put évincer l'idée qu'il ne tenait plus et qu'il n'arrivait plus à se contenter que de simples baisers. Ce qui intérieurement la rassurait, parce qu'elle n'en avait strictement aucune envie là maintenant. Elle y avait certes déjà songé, et s'en était même confessée auprès du père Marco, mais elle n'aurait jamais accepté de le faire avant d'être mariée. Dans la sinistre hypothèse où le marquis finirait par se désintéresser d'elle, elle aurait été promise à quelqu'un d'autre, et ce quelqu'un d'autre aurait fini par la lapider en voyant qu'il n'était pas le premier homme dans la vie de Lucia. Face à ce genre de potentiels petits désagréments particulièrement violents et douloureux, elle préférait retenir ses ardeurs et se contenter de baisers qui, s'ils n'étaient pas non plus permis par l'Eglise avant le mariage, ne laissaient pas de traces.

Elle l'écoutait distraitement, toujours entre deux eaux. Elle avait d'ailleurs du mal à se tenir assise et chancelait légèrement, laissant parfois tomber sa tête sur l'épaule du Liancy. De sentir quelque chose contre son oreille la faisait relever subitement la tête, comme pour montrer qu'elle était bien là et qu'elle n'était pas du tout en train de se rendormir. Au bout de quelques redressements de tête, elle finit par abandonner et laissa sa tête contre le bras du marquis, la hochant légèrement de temps en temps pour montrer qu'elle écoutait à peu près ce qu'il était en train de lui raconter. De ce qu'elle en comprenait, il essayait de gagner du temps pour repousser le plus possible quelque chose de super important, qu'il avait envie de lui dire, là maintenant. Il n'avait pas pu attendre le lendemain matin pour lui parler des notables, des épouses et d'une marquise. Son inconscient donna un coup de pied au cul de son esprit pour en chasser la fumée lorsqu'il entendit qu'il était question d'une femme dont le marquis était tombé amoureux. Qui ! Qui était cette femme ? Pourquoi venait-il lui parler de cela en pleine nuit, quelques jours après avoir fait débarquer Arambour sur l'île ? Il n'y avait donc pas qu'une histoire de défense ? Elle le savait ! Mais trop peu motivée pour s'énerver, elle se contenta d'une simple moue avant de se sentir tomber sur le côté. Il venait de s'éloigner d'elle. Avait-il peur qu'elle lui colle sa main dans la figure ? L'espace d'une seconde, elle regarda partout autour d'elle avant de constater qu'il lui tenait toujours la main et qu'il se trouvait à ses pieds. Il prononça encore quelques mots, qu'elle dut s'affairer à passer à la moulinette de la traduction avant de les comprendre. Il aurait au moins pu avoir pitié d'elle et continuer en italien vu l'heure...

L'effort de transcription avait épuisé ses dernières ressources, et de ce qu'elle en avait saisi, il l'avait tutoyée et lui avait demandé si elle acceptait de l'épouser. En pleine journée, elle aurait assurément sauté de joie avant de le regarder avec un air taquin en montrant son annulaire, comme pour lui signaler qu'il manquait un petit quelque chose à cette demande en mariage. Mais là, elle était vraiment en train de quitter le "monde des vivants" pour rejoindre le monde des rêves. La jeune femme se frotta l'oeil avec sa main libre et regarda le Liancy en lui souriant doucement ; ce sourire qui en disait certainement plus long que ce qu'elle réussit à dire, en italien bien sur :


-Ce n'est vraiment pas très joli en français... Ti amo... C'est plus chantant. Non ? Mais comme ce n'est pas votre faute, je répondrai... Effort surhumain pour passer en français. Oui ! Et repassant en italien, avec un discours un peu décousu. Mais... Est-ce que ? Il faut en reparler demain. Quand il fera soleil...Quand je serais ta marquise oui...

Il ne fallait décidément pas la réveiller lorsqu'elle venait à peine de s'endormir. Une véritable catastrophe ! Un zombie. Pour une demande en mariage, on pouvait dire qu'elle était ratée. Il aurait quand même pu attendre le lendemain... Il n'était pas à six heures près, si ?
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Message par Rodrigue de Liancy Ven 6 Mai - 18:09

Si. Et pourtant Rodrigue le savait bien que c'était totalement idiot ce qu'il venait de faire. Il l'avait éveillée pour le demander en mariage. Parce qu'il était impatient, il venait lamentablement de rater sa demande en mariage. Il y avait quelque chose de tendre dans la façon qu'avait Lucia de lutter contre le sommeil pour répondre à sa question ô combien importante, mais le Liancy savait que cette réponse sortait de la brume du sommeil et qu'au petit matin le lendemain, elle pouvait très bien ne se souvenir de rien, attribuant ses souvenirs à un simple rêve. Et si elle se souvenait de cette demande en mariage, peut-être que demain matin le « oui » allait se transformer en « non ».

Oui, le Liancy était déçu. Il ne lui en voulait pas, il avait été assez stupide pour croire qu'à cette heure de la nuit tout le monde avait encore les idées claires. Rodrigue sentait sa mine se décomposer et l'inquiétude poindre dans son esprit. Il n'était pas utile de poursuivre cette visite nocturne, ni même d'insister pour obtenir mieux que le discours décousu qu'il venait d'entendre.


- Oui, nous en reparlerons demain.

Sa voix soudainement éraillée venait de trahir l'absence de joie qu'il éprouvait. Heureusement pour lui, Lucia semblait bien trop endormie pour se rendre compte de quoi que ce soit. Il déposa un baiser sur sa main, et, voyant qu'elle ne souhaitait que se recoucher, la prit dans ses bras pour l'embrasser délicatement avant de lui souhaiter une bonne nuit. D'une main légèrement vacillante sous la colère qu'il éprouvait contre lui même, il prit la bougie posée un peu plus tôt sur le chevet et sortit en veillant à faire le moins de bruit possible.

Il regagna alors sa chambre, en traînant des pieds sous le poids de son demi-échec. Rodrigue était à deux doigts de se taper la tête contre les murs en se disant qu'il allait peut-être devoir tout recommencer plus tard. Sa déception était telle qu'il ne prenait même plus garde à ce qu'il faisait. Lui qui verrouillait scrupuleusement la porte de sa chambre en général, avait complètement omis de le faire et s'était empressé de se déshabiller pour retourner dans ce lit dans lequel il aurait mieux fait de rester bien sagement.

Le rouquin peina à s'endormir. Les heures passèrent et le bruit de la mer qui finissait toujours par le bercer n'avait aucun effet sur lui. S'il croisait Lucia dans les couloirs du château le lendemain, comment devait-il agir ? Faire comme si elle avait dit oui alors qu'elle n'était pas en pleine possession de ses moyens pour le faire ? Ou comme si rien ne s'était passé ? Ou réitérer sa demande en mariage sous peine de passer pour un gros pigeon si jamais elle venait à refuser de lui offrir sa main ? Rodrigue soupira, désemparé, et s'enfonça dans son lit. Ce ne fut alors qu'au beau milieu de la nuit qu'il tomba dans un profond sommeil.
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Message par Lucia de Liancy Ven 6 Mai - 18:38

Et ce fut avec un délicieux sourire qu'elle retrouva enfin son oreiller et ses draps. Elle était ravie de sentir les plumes sous sa tête, mais plus encore d'avoir reçu un bisou avant de retourner là d'où elle avait été sauvagement tirée. A peine allongée, elle dormait déjà à points fermés et ne fit même pas attention au départ hautement désappointé du marquis. Le reste de sa nuit fut agréablement bercé par des rêves tous plus beaux les uns que les autres. Elle se voyait parfois mariée, parfois avec des enfants qui ne pouvaient être autres que les siens, et parfois même simplement dans les bras de son beau marquis à parler de choses futiles. Ce ne fut qu'aux premières lueurs du jour qu'elle s'étira, d'extrêmement bonne humeur ! Elle n'avait certainement pas oublié la visite nocturne du marquis, ni même son contenu, et elle comptait bien lui faire payer en faisant exactement la même chose que lui, mais très tôt le matin. Elle savait qu'il n'appréciait pas forcément se lever aux aurores contrairement à elle. Ce qui s'avérait logique puisqu'elle se couchait avec les poules, tandis que lui grattait encore le papier malgré un soleil couché depuis des heures.

Il l'avait vue en robe de chambre et mal coiffée, alors elle ne perdit pas de temps à se faire belle pour aller à sa rencontre et enfila simplement une robe et se passa un rapide coup de brosse dans les cheveux. Fin prête, ou du moins partiellement prête puisqu'en règle générale elle mettait tout de même beaucoup plus de temps que cela à se préparer, elle sortit à vitesse grand V de sa chambre, manquant d'ailleurs de peu le télescopage avec la domestique qui traînait dans le couloir. Cette fois, il y avait bien quelqu'un qui passait le balai. Elle la salua d'un air guilleret et se hâta vers le dernier étage du château, là où elle n'avait normalement pas le droit d'aller. D'ailleurs, c'était comme si Guido avait senti qu'elle allait entrer dans l'antre du loup, parce qu'elle le croisa dans l'escalier et il ne tarda pas à lui demander ce qu'elle comptait faire.


-Si vous m'empêchez de monter, je vous dénonce !
-Me dénoncer ? Mais pour quelle affaire ?
-Je ne sais point encore. Mais je trouverai. Alors laissez moi monter !
-Mais il d...
-Je sais très bien qu'il dort. C'est justement la raison pour laquelle je dois monter.

Le regard noir de la jeune femme le fit abandonner. Il n'aurait qu'à dire qu'il ne l'avait pas vue monter, il s'excuserait platement, et le tour serait joué De toute façon, si elle devenait la marquise de Giglio, il n'allait tout de même pas continuer à l'empêcher d'investir ses quartiers. Arrivée devant la porte de la chambre du Liancy, elle s'arrêta pour prendre une grande inspiration. Il allait très certainement mal prendre ce réveil. Elle avait déjà essayé de le réveiller de si bon matin, la fois où elle lui avait fait croire qu'elle voulait quitter le château. Et de ce qu'on lui avait raconté, il avait grommelé tout ce qu'il pouvait avant de daigner descendre jusqu'en salle d'armes. Il fallait donc qu'elle s'attende à un Rodrigue ronchon malgré le sourire angélique qu'elle allait arborer. Une fois remontée à bloc et prête à affronter le monstre qui dormait dans la caverne, elle ouvrit tout doucement la porte, la referma tout aussi doucement une fois entrée, et se dirigea à pas de loup vers les rideaux avant de les tirer pour laisser entrer le soleil en disant haut et fort avec son bel accent français :

-Debout très cher fiancé ! Nous avons beaucoup de choses à faire aujourd'hui ! Il faut choisir le menu, la robe, le costume, les témoins et surtout prévenir le père Marco !

Elle s'approcha de lui pour s'asseoir sur le bord du lit et poursuivit en italien sur un ton plus bas, bien plus agréable au réveil, avec son petit air taquin :

-J'espère que tu ne m'as pas menti cette nuit. J'ai déjà prévenu tout le monde au château...
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Message par Rodrigue de Liancy Ven 6 Mai - 19:56

Rodrigue dormait à poings fermés, enroulé dans ses draps comme un petit garçon qui voulait qu'on le laisse mourir en paix après avoir eu la honte de sa vie. Ainsi, il n'entendit pas Lucia entrer clandestinement dans sa chambre, ni s'approcher des rideaux et encore moins les ouvrir. Mais contrairement à elle, lorsqu'on le réveillait, il se réveillait vraiment. Rodrigue sursauta donc lorsqu'il entendit la voix chantante de la Casari, se demandant l'espace d'un instant s'il n'était pas en train de rêver. Après avoir cligné de l'oeil et l'avoir découverte dans sa chambre, le Liancy constata qu'elle était bien réelle, pour sa plus grande joie. D'ordinaire, il se serait jeté sur le malotru qui se serait permis de le réveiller de cette manière, mais il était trop heureux de la voir pour se plaindre de quoi que ce soit. Le marquis était d'autant plus heureux qu'il lui semblait avoir entendu « très cher fiancé » ce qui laissait penser qu'elle n'avait rien oublié de ce qui s'était passé durant la nuit et que, surtout, elle avait maintenu sa réponse positive.

Armé de son plus grand sourire, il la suivit du regard jusqu'à ce qu'elle s'installât sur le bord du lit. Elle était belle, délicieusement belle. Et qu'il aimait l'entendre le tutoyer, abandonnant pour de bon les petites formules de politesse qu'il ne supportait plus d'entendre de sa bouche. Son air taquin acheva de l'éveiller et, tout aussi joueur, il s'approcha d'elle et l'entoura de ses bras pour l'attirer contre lui. Il fallait après tout que Lucia se fasse à l'idée de lui appartenir, car bientôt elle allait être sa femme et la mère de ses enfants. Tendrement il l'embrassa à plusieurs reprises dans le cou, avant de revenir, en chuchotant en italien au creux de son oreille, sur ce qui semblait être une gentille plaisanterie.


- Ah oui ? Et qu'ont-ils dit ? Je suis vraiment, mais alors vraiment, déçu d'apprendre que tu as révélé notre secret à tout le monde avant même que je n'aille demander officiellement ta main à ton père.

Déçu lui ? Pas le moins du monde. Il se doutait bien qu'elle plaisantait car Guido se serait déjà pointé dans ses quartiers pour lui adresser de chaleureuses félicitations tout en lui demandant ce qu'il devait faire.
De bonne humeur, il reprit ses embrassades dans le cou de la Casari, puis sur ses joues et ses lèvres. Rodrigue avait conscience de n'être guère présentable, torse nu, les cheveux en bataille et pas rasé, mais il n'en avait strictement rien à faire. Il ne pensait qu'à câliner sa fiancée, à lui dire qu'il l'aimait et à les imaginer mariés, entourés de leur très glorieuse descendance. Le jeune homme était en train de prendre une gigantesque vague de bonheur en plein visage et rien ne pouvait entamer sa joie. Espiègle, il mordilla son oreille et reprit :

- « Choisir le menu, la robe, le costume… et prévenir le père Marco » c'est bien ce que tu as dit ? Je ne te savais pas si impatiente ma Lucia. Rodrigue rit et resserra son étreinte. Cela demandera quelques mois, mais j'ai hâte d'y être. J'irai voir ton père dès aujourd'hui et j'inviterai le Père Marco pour que nous puissions commencer les préparatifs le plus tôt possible. Une annonce officielle publiée demain ou après-demain te conviendrait ?

Rodrigue aurait donné très cher pour voir les visages du clan Massari à la lecture de ladite annonce. Mais il était déjà bien au-delà de ces considérations d'ordres politiques. Lucia était le plus beau parti de l'île et il en était amoureux. Dès lors plus rien d'autre n'entrait en jeu et les protestations des prétendantes malheureuses n'y changeraient rien. Lucia Casari allait devenir sa femme et par conséquent, Marquise de Giglio. De plus, le marquis avait la ferme intention de procéder à un mariage magnifique, à la hauteur de sa fiancée et du prestige qu'il cherchait à conférer à l'île de Giglio. Il avait d'ailleurs déjà quelques petites idées qu'il s'empresserait de proposer à sa fiancée dès que les préparatifs seraient officiellement lancés. Lui qui d'ordinaire n'aimait pas vraiment les cérémonies, se prenait d'ores et déjà au jeu. A croire que Lucia faisait de lui un tout autre homme...
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Message par Lucia de Liancy Ven 6 Mai - 20:59

-Qu'ils tueraient pour avoir une aussi belle épouse que toi !

La Casari avait beau être quasiment mariée, elle n'en oubliait pas moins que c'était en partie parce qu'elle l'avait honteusement charmé pendant des semaines et des semaines. Et elle n'allait certainement pas arrêter maintenant que son but était atteint. Elle y avait pris tellement de plaisir qu'elle se voyait mal s'en priver maintenant. Depuis, il devait de toute façon commencer à avoir l'habitude qu'elle se mette en avant de cette façon. Elle savait qu'elle était belle, tant on le lui avait répété depuis des années. Pourtant, lorsque le compliment venait de Rodrigue, qu'il soit audible ou non -car l'oeil du roux ne savait pas mentir, surtout de bon matin-, elle ressentait une sorte de satisfaction personnelle, parce qu'elle avait l'impression qu'il était le seul à lui montrer qu'elle était belle tant à l'extérieur qu'à l'intérieur.

Les yeux clos, elle laissait la valse des baisers se jouer là où il le voulait. Elle n'émettait aucune résistance, s'abandonnant complètement aux bras et aux lèvres du marquis. Néanmoins, lorsqu'il sentit son souffle une nouvelle fois près de son oreille, et puis finalement ses dents contre son lobe, elle émit un soupir d'aise avant d'ouvrir lentement les yeux, de les lever vers le plafond et de lui offrir un petit sourire mutin. Elle rit avec lui en l'entendant parler de son impatience et de son accent français chantant elle répondit tout simplement :


-C'est la première chose qui est venue dans mon esprit en ouvrant les rideaux ! Je ne suis pas si impatience, j'ai juste hâte. Comme toi finalement. Elle posa son index contre ses lèvres, et opta pour une mine faussement réfléchie. Après-demain ? Mais pourquoi ! Il faut la faire maintenant. dit-elle sur un ton rieur en insistant bien sur le "maintenant".

Elle se redressa soudainement, prise d'une envie irrésistible d'être monstrueuse. Et elle en avait tellement envie qu'elle en perdit son français :


-Oh s'il te plaît ! Laisse moi l'annoncer à Paola et Flavia. S'il te plaîîîîîîîît.

Rien que d'imaginer la tête des soeurs Massari à cette annonce lui procurait un plaisir immense. Elles avaient fourni tellement d'efforts pour mettre le marquis dans leur couche, que la simple idée de les avoir devancées sans avoir essayé de vendre corps et âme la faisait rire. Certes, elle avait l'avantage d'être belle et intelligente tandis qu'elles n'avaient pas un physique des plus grâcieux et qu'elles n'avaient pas inventé l'eau chaude. Mais il y avait des hommes qui aimaient les pintades décérébrées... Des français peut être ? Leur seul problème étant qu'elles n'étaient pas nobles, et que leur père n'était pas forcément le plus riche de l'île, ce qui les rendait tout de même difficile à caser. Dès qu'elle serait marquise, elle les ferait... virer du château pour commencer, et après elle ferait tout pour les virer carrément de l'île en leur cherchant un parti loin. Très loin. Elle n'avait aucune envie de les avoir dans les pattes, ni autour de son marquis. Non mais. Il n'y avait bien qu'Arambour qu'elle saurait tolérer dans le périmètre de sécurité qu'elle allait installer autour de son futur époux, et simplement parce qu'elle était responsable de la protection de l'île et donc à fortiori du marquis.
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