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Au bal masqué ohé ohé !

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Au bal masqué ohé ohé ! Empty Au bal masqué ohé ohé !

Message par Lucia de Liancy Sam 16 Avr - 18:54

Dans le bureau au dernier étage. Elle espérait fortement qu'il s'y trouvât afin de ne pas être contrainte de descendre dans les entrailles du château ou de le chercher partout.... Il lui avait dit qu'elle pourrait le voir là bas toute la journée, mais la jeune femme n'était pas née de la dernière pluie, et elle savait que passer des heures assis face à un secrétaire à compter ce qui entrait et sortait des caisses du marquisat n'était pas des plus passionnant. Elle pouvait donc tout à fait arriver dans le bureau du marquis, juste au moment où il ferait sa "pause syndicale". Elle quitta donc sa chambre et fit une petite pause, le temps de réfléchir à l'endroit où elle devait se rendre, et surtout à comment elle pouvait s'y rendre. Après quelques tours et demis tours, elle trouva finalement les escaliers et grimpa au 3ème étage. Là haut, elle hésita encore quelques instants sur la porte qu'elle devait choisir. Elle s'arrêta devant l'une d'elle, prête à toquer et se ravisa pour se diriger vers une autre porte. Cette fois, elle conclut son geste et frappa, chargée du vélin contenant les informations pécuniaires pour le bal dans l'autre main. Elle retint son souffle, dans l'espoir d'entendre une voix lui intimant d'entrer. Fort heureusement, le miracle fût et la voix de Rodrigue retentit. Sans plus attendre, elle baissa la poignée et pénétra dans le bureau avant de faire un léger signe de tête, par pure politesse. Elle tira ensuite un siège qui se trouvait dans un coin de la pièce pour s'asseoir près du marquis et dérouler le vélin sur le secrétaire. Pas peu fière d'exposer tous ses calculs, dans lesquels elle avait pris en compte le vin, le poisson, les fruits et légumes, ainsi que le pain et le fromage, et même le salaire des ménestrels, et les quelques ajouts décoratifs. Elle s'éclaircit la gorge avant d'expliquer, en italien pour ne pas perdre trop de temps :

-Il y en a pour 214 florins Votre Magnificence. Il me semble que cela fait un peu moins de 100 écus pour le Royaume de France. Les plus grosses dépenses sont pour la décoration, mais je puis en mettre moins si vous le souhaitez. Vous pourrez également revendre les draps de damas à l'Archevêché. Ils adorent faire des économies, et s'il s'agit d'une seconde main, ils en feront nécessairement. A moins que vous ne souhaitiez les garder, pour une prochaine réception peut être.

Mine de rien, la jeune femme évoquait déjà l'idée de faire de nouveaux bals à l'avenir, qu'elle se proposerait d'organiser avec hâte. Tous les moyens étaient bons pour rester le plus longtemps possible dans ce château. Elle avait passé à peine quelques heures dans sa chambre, mais elle s'y trouvait déjà à son aise et n'avait aucun envie de la quitter. Non pas que la chambre qu'elle avait à Giglio Porto lui déplaisait, mais elle avait un défaut majeur : le marquis se trouvait bien trop loin pour qu'elle puisse le charmer aisément. La question économique ayant été évoquée, et afin qu'il ne s'y attarde pas trop histoire de pouvoir faire tout ce qu'elle avait prévu, elle poursuivit sans lui laisser le temps de dire quelques mots :

-Concernant l'organisation du bal en lui même, j'avais pensé faire un bal masqué. Vous le savez sans doute pour les avoir vus, les notables de Giglio ne s'apprécient point tous. Il n'est point rare que leurs rencontres dégénèrent, plus encore au vue de notre situation. D'autant qu'il n'est point concevable d'inviter une partie des notables, et point les autres. Ce serait extrêmement déplacé. C'est pourquoi je comptais sur les masques pour couvrir les visages, et sur la musique pour couvrir les voix. Ainsi donc personne ne saurait à qui il parle, et nous n'aurons point d'incident diplomatique. Vous ne les connaissez point encore pleinement, mais dès lors que ce sera le cas, vous comprendrez tout à fait pourquoi je vous aurais proposé cela aujourd'hui.

Elle sourit en coin, des plus ravie de son argumentaire sur le bal masqué. En fait, ce qu'elle ne voulait surtout pas, c'était que l'une des filles de l'île lui tape dans l'oeil. Situation à priori impossible puisque tout le monde s'accordait à dire qu'elle était la plus belle femme de Giglio. Mais afin de limiter les risques, elle avait pensé à cet astucieux stratagème. Elle avait également un deuxième avantage que les autres n'avaient pas, c'était qu'elle savait comment faire pour que le marquis la reconnaisse malgré le masque. Elle pourrait donc continuer à le charmer, tandis que les autres pourraient s'y essayer sans qu'il ne puisse savoir qui elles étaient. N'a-t-on pas déjà dit que la guêpe n'était pas folle ?


Dernière édition par Lucia Casari le Dim 17 Avr - 0:13, édité 1 fois
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Message par Rodrigue de Liancy Sam 16 Avr - 19:54

Quand Rodrigue vit Lucia Casari entrer dans son bureau, il se félicita de lui avoir proposé d'organiser un bal au château, et pour ce faire, d'y résider. Même si elle venait pour affaires, cette présence féminine l'extirpait du marasme des comptes. Comptes dans lesquels il s'était plongé après avoir mal débuté sa journée. Le Liancy avait enfin trouvé un maître d'armes, malheureusement, ils n'étaient pas encore tout à fait calés, et Rodrigue pas encore habitué au fait de n'avoir plus qu'un œil. Le résultat fut sans appel : un méchant coup d'épée émoussée dans les côtes, en provenance direct de son angle mort. Le Marquis de Giglio n'était pas douillet, mais il n'en était pas moins ressorti de l’entraînement avec une douleur persistante au côté gauche. Il était donc monté dans son bureau, avait pris une pile déprimante de parchemins tous plus gribouillés de chiffres les uns que les autres, et s'était mis à travailler consciencieusement, lui faisant oublier sa douleur.

La visite de Lucia restait dans le même thème. Des questions d'argent. Elle avait déjà bien travaillé, lui donnant déjà des chiffres précis et une bonne surprise. Le roux s'était attendu à des dépenses bien plus excessives et s'était déjà mentalement préparé à rogner sur quelques frais de fonctionnement du château pour y faire face. Mais la Casari, en bonne fille de marchand, avait déjà fait le nécessaire pour que les coûts soient justifiés. Quant à Rodrigue, lui aussi fils de marchand, il ne prit pas longtemps pour valider le budget requis.


- Cela me convient. N'enlevez pas de décorations par rapport à ce que vous avez prévu. Les décorations sont importantes, et je n'aimerais pas que nos invités pensent que nous leur en avons offert une au rabais. Quant aux draps de damas… nous verrons. Même si en général j'apprécie le renouvellement car cela fait travailler les artisans.

Si ce premier point, très important au demeurant, était déjà réglé, le second posa plus de problème au Liancy qui fronça les sourcils et se mit à triturer un parchemin du bout des doigts. Un bal masqué… C'était vexant. Très vexant. Il regarda l'organisatrice du bal d'un air suspicieux, faussement outré.

- Un bal masqué ? Alors que je le suis déjà à moitié. Ce n'est pas très correct de se moquer de son Marquis.

Cela n'avait en réalité aucune importance. Du moins ça n'en avait pas le concernant directement. Il finit alors par sourire en coin, prit une grande respiration pour se mettre à réfléchir, mais grimaça lorsque ses côtes lui rappelèrent comment elles avaient été malmenées un peu plus tôt. Les arguments en faveur d'un bal masqué avancés par Lucia se tenaient. Sauf que Rodrigue avait initialement pensé faire ce bal pour faire connaissance avec les notables et leurs proches, tout en les distrayant après de longues semaines passées à s'écharper pour un trône qu'ils n'avaient finalement pas eu. Avec les masques, il ne restait que la dimension festive de l'événement. La Casari avait pourtant raison et il dut se rendre à l'évidence : les notables se détestaient pour la plupart et étaient fichus de rompre la trêve tacite qui s'était installée après qu'on eut couronné Rodrigue. En plein bal destiné à redorer l'image de la haute-société de l'île, cela serait du plus mauvais effet.

- J'accepte le bal masqué. J'ai eu un aperçu des joutes verbales des notables de Giglio et je ne suis pas sûr de vouloir revoir ça en une telle soirée. Reste maintenant que cela manquera de mystère me concernant. On ne doit pas voir d'hommes roux et borgnes tous les jours à Giglio. Mais au moins je ne serais pas tenté de favoriser une cavalière plus qu'une autre, il n'y aura pas de jalousie.

Rodrigue rit et cessa de triturer le parchemin dont le coin avait fini par être chiffonné. Le Liancy savait très bien qu'il allait être le centre de toutes les attentions en sa qualité de Marquis. Le bal allait être un exercice bien plus périlleux qu'il n'y paraissait.

- Vous pouvez envoyer les invitations. Tous les notables doivent être invités. Sans exception. Il y a plusieurs domestiques lettrés au château. Si vous voulez leur aide, je vous les confie. Quant à la date…

Il souleva une pile de parchemins, en prit un à demi-vierge parmi eux et se mit à griffonner dessus. Ils étaient à la mi-juin. Deux semaines auraient été parfaits. Mais il était peu probable que les notables – et lui-même d'ailleurs – réussissent à avoir une tenue décente et prête en moins de deux semaines si l'on comptait le temps nécessaire pour envoyer les invitations. Trois semaines. Pas une de plus.

- Pour la date, mettez celle du 8 juillet. C'est à la fois proche et assez loin pour que tout soit prêt. Qu'en dites-vous ?
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Message par Lucia de Liancy Dim 17 Avr - 0:50

Elle lâcha un léger rire nerveux lorsqu'il évoqua le fait qu'il était déjà à demi masqué. Elle avaitbdéjà oublié que le marquis n'avait plus qu'un oeil valide, et n'avait donc même pas pensé qu'il aurait pu éventuellement se vexer de cette proposition. Comme si elle l'avait faite pour que "tout le monde soit logé à la même enseigne". Or, la raison était bien loin de celle là en réalité. Fort heureusement, il ne semblait pas lui en tenir rigueur et accepta sans plus broncher, en émettant cependant une remarque fort à propos... La jeune femme se mit immédiatement à réfléchir au contournement de ce problème épineux. Comment faire pour que le marquis se fonde bien dans la masse ? Parce qu'il était effectivement le seul roux de l'île, et probablement le seul qui fasse cette taille également. Pour la taille, elle ne pouvait guère y faire quelque chose, par contre pour la couleur...

-Je puis vous faire une coloration afin de vous foncer les chev....

Elle ne termina même pas sa phrase. La mine dégoûtée du marquis en disait long concernant son envie d'adopter le style capillaire italien l'espace d'un bal. Elle se ravisa donc et haussa simplement les épaules en lui souriant bêtement. Il serait le renard parmi les corbeaux, le couronné parmi les envieux, et tant pis. Un infime mouvement des narines vint faire écho à l'évocation des "cavalières" et de la "jalousie" que cela pourrait engendrer. Elle cligna nerveusement deux fois des paupières avant de noter dans un coin de sa tête qu'elle devait inviter tous les notables de l'île sans exception.

-J'irais à la rencontre de Père Mario. Il m'aidera pour les enluminures. Je ne doute point que vos gens sachent écrire, mais l'important est que cela soit bien écrit.

Elle se releva, rapportant son siège là où elle l'avait trouvé. De dos dans l'embrasure de la porte, elle fit un mouvement de la main par dessus son épaule en tournant légèrement la tête du même côté. Elle lâcha quelques mots avant de quitter définitivement la pièce :

-Considérez que c'est fait, Marquis.

Les trois semaines qui suivirent cet entretien furent intenses pour la Casari. Dès le lendemain, elle s'était rendue à l'église Saint-Pierre afin de demander l'aide du curé de l'île pour la rédaction des invitations. Evidemment, en homme d'Eglise extrêmement altruiste, il avait accepté, à condition que le marquis soit présent à tous les offices. Considérant que Rodrigue ne pouvait être autrement que très croyant puisqu'il avait décidé d'investir une île dan le berceau de la religion, elle accepta pour lui. De toute façon, elle l'y guiderait de force s'il le fallait, car elle, était très croyante. Les trois premiers jours furent donc consacrés à la rédaction des vélins d'invitation. Elle se souvint ensuite qu'elle n'avait pas pris en compte les coursiers dans son calcul... Et afin de n'avoir aucune dépense supplémentaire à faire, elle convoqua les domestiques du château pour accomplir cette tâche. Elle alla personnellement déposer celle pour les Guantieri et pour son père, en profitant pour lui donner rapidement quelques nouvelles avant de repartir presque aussitôt pour le château. Les derniers jours de la semaine furent utilisés pour les "flâneries" dans les allées du marché, à la recherche des meilleurs produits qui orneraient le buffet le jour du bal. Une fois les marchands choisis, ce fut au tour des draperies et des couturières, aux quelles elle demanda une robe pour l'occasion en même temps. Habituellement, elle serait venue tous les jours à l'atelier pour connaître l'avancement de la confection, mais cette fois, elle n'aurait pas le temps. Elle leur faisait donc pleinement confiance, mais comme à chaque fois qu'elles travaillaient pour elle, le travail était parfait, elle ne se faisait aucune inquiétude. Puis vint le tour du choix des ménestrels, et ce fut déjà le moment de commencer l'organisation de la salle de réception. Plus les jours avançaient, plus la Casari était exténuée et n'attendait plus qu'une chose : le 8 juillet.

Afin de paraître en pleine forme le jour dit, elle s'était gardée les deux derniers jours de son programme pour se reposer, et ainsi résorber les poches qui commençaient à lui grignoter le contour des yeux. De bonne heure et de bonne humeur le matin du bal, la jeune femme se trouvait déjà devant les portes du château à faire le pied de grue. Les marchands ne tardèrent pas à faire leur apparition avec leurs charrettes remplies des victuailles qu'elle avait demandées. Elle passa un certain temps à vérifier que la totalité s'y trouvait bien avant de payer son dû et de les remercier chaleureusement pour leur aide. Avec l'aide des domestiques du marquis, elle fit disposer tous les plats sur les tables prévues pour le buffet. Il fallait que tout soit bien agencé afin de donner bonne impression dès l'entrée !  Les directives étaient claires, parfois un peu sèches, mais la Casari savait exactement ce qu'elle voulait, et elle n'acceptait aucune fausse note. Tout devait filer comme elle l'avait décidé, et pas autrement. Elle jeta un coup d'oeil rapide par la fenêtre afin d'avoir une idée de l'heure qu'il était, et pour s'assurer qu'elle était encore dans les temps. Et elle l'était ! Peu après midi, la salle de bal ressemblait parfaitement à ce qu'elle avait imaginé. Elle resta de longues minutes à contempler le travail accompli et soupira d'aise avant de taper plusieurs coups dans ses mains pour féliciter tout le monde du travail. Elle passa dans le bureau du Liancy afin de le prévenir que tout était prêt et qu'il n'y avait plus qu'à attendre les invités, et qu'elle se trouverait dans ses quartiers en train de se pomponner si jamais il la cherchait. Elle avait hâte que le bal commence !
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Message par Rodrigue de Liancy Dim 17 Avr - 1:01

Pendant trois semaines, le château s'était progressivement animé au rythme des préparatifs pour le bal. Tout le château ? Non, le troisième étage était resté un espace de sérénité, Rodrigue ayant pris soin de déléguer tous les préparatifs à Lucia Casari. Il savait que toute la pression allait reposer sur les épaules de la jeune femme, mais elle était bien plus douée pour organiser un tel événement que lui. De ce qu'il avait pu constater pendant les trois semaines précédent le jour J, Lucia s'en était sortie avec brio. La fête serait parfaite, et cela serait surtout grâce à elle. Lui n'avait qu'à superviser et se préparer dans son coin. Il avait ainsi pu se faire préparer une tenue, obtenir un beau masque – même si tout le monde allait le reconnaître en une seconde – mais aussi commander de quoi récompenser Lucia pour tout son travail. Si le bal était une réussite, bien évidemment.

*

Le jour tant attendu par l'île de Giglio, mais surtout ses notables, était arrivé. L'heure du verdict aussi. Qu'allaient dire les notables qui s'étaient fermement opposés à l'arrivée de Rodrigue sur le trône ? Allaient-ils médire sur cet événement important, juste pour éviter de reconnaître qu'ils s'étaient trompés dans leur jugement ? Ou allaient-ils hypocritement participer aux festivités en louant la réussite de la soirée pour mieux la dénigrer en quittant les lieux ? A en juger par les visages angoissés des domestiques, ces derniers se posaient plus de questions que Rodrigue lui-même.

Dans sa tunique bleue nuit, son visage entièrement recouvert d'un masque, il accueillit les premiers invités. La plupart logeait à Giglio Castello. Les autres avaient décidé de rentrer par leurs propres moyens à la fin de la soirée car le temps le permettait à cette époque de l'année. Seule une toute petite poignée passerait la nuit sur place, au premier étage où de nombreux domestiques achevaient encore de préparer les chambres. Rodrigue n'avait pas encore vu Lucia, peut-être était-elle encore en train de se préparer. Il avait, en revanche, repéré Guido, qui avait opté pour une tenue d'un goût un peu douteux, aux couleurs criardes et démodées. Heureusement pour le Marquis, son bras droit n'était pas le seul à avoir des goûts pitoyables. En saluant les invités qui ne cessaient plus d'arriver, il avait pu repérer quelques couples de notables à qui le mot « élégance » semblait être un gros mot. D'autres, au contraire, avaient su être beaux dans leurs costumes alors que Rodrigue savait pertinemment, pour les avoir reconnus, que leurs moyens financiers ne leur permettaient pas de faire des folies en terme d'habillement.

Les ménestrels étaient déjà à l’œuvre. Et le flot des invités ne s'arrêtait pas. Rodrigue enchaînait les salutations, les mots aimables. Désavantagé car tout le monde savait qu'il était le Marquis de Giglio, quand lui ne devinait que bien rarement à qui il s'adressait. Il avait repéré Marco Guantieri, son épouse et leurs filles, mais aussi Fabrizio Casari qui devait être fier du travail accompli par sa fille. Guido, de son côté, allait de petits groupes en petits groupes, échangeant avec les invités, prenant la température. Puis il venait glisser un mot à Rodrigue, pour lui dire que tout semblait aller pour le mieux, les invités complimentant la décoration, les ménestrels et ayant déjà leur avis sur le buffet qu'ils jugeaient à la hauteur d'une telle soirée. Tout allait donc pour le mieux.

Tout le monde était arrivé, ou presque. Les retardataires seraient bien évidemment acceptés, mais ils allaient devoir se passer des salutations de Rodrigue qui rejoignait le centre de la salle de réception pour marquer officiellement le début du bal. Le rouquin avait passé des jours et des jours à préparer son discours, voulant effacer au maximum son accent français et éviter d'y inclure des fautes grossières. Il remerciait ainsi tous les invités pour leur présence, toutes les personnes ayant contribué à préparer cette soirée, n'oubliant évidemment pas de nommer Lucia Casari qui fut la première d'entre elles, puis il annonça solennellement que le bal pouvait enfin commencer. Chaque danseur était ainsi invité à prendre une cavalière pour cette première danse. Les petits groupes d'invités se désagrégèrent alors en une multitude de paires qui s'apprêtaient à former un très grand groupe au milieu de la salle de réception, tandis que les plus âgés restaient à l'écart, déjà enchantés par le spectacle qui allait s'offrir à eux.

Tout en parlant, Rodrigue avait aperçu Lucia. Bien que masquée, il avait réussi à la distinguer des autres jeunes femmes de la salle. Sûrement parce qu'elle était la seule femme à Giglio qu'il voyait régulièrement, ce qui lui permettait plus aisément de la repérer par rapport aux autres qui n'étaient que d'obscures inconnues, encore plus en cette soirée. Se frayant un chemin parmi les couples déjà prêts à danser, il la rejoignit et se tenant devant elle, lui tendit la main en s'adressant à elle en français :


- Est-ce que la jeune femme ayant permis à cette soirée de se tenir dans les meilleures conditions accepterait d'être ma cavalière pour cette première danse ?

A défaut de pouvoir lui sourire, sa voix s'était faite aimable, comme un remerciement bien plus personnel que celui qu'il avait prononcé quelques minutes auparavant devant tout le monde.
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Message par Lucia de Liancy Dim 17 Avr - 13:30

Apparemment, le Liancy n'eut pas besoin d'elle au cours de l'après-midi, puisqu'elle n'eut pas à se cacher rapidement en entendant la porte s'ouvrir. Heureusement, ou malheureusement, elle ne savait pas si son absence était présage de bonne nouvelle, ou s'il ne venait pas parce qu'en bas, c'était en fait un véritable carnage. Préférant nettement s'imaginer la première solution, c'est en sifflotant gaiement qu'elle continua de se préparer, admirant le magnifique travail des couturières sur sa robe et son masque. Elle n'avait plus qu'à envoyer la facture à son père, qui serait assurément ravi encore une fois. Il la sermonnerait pendant de longues minutes, puis elle lui ferait ses yeux de biche apeurée avant de lui fournir quelques explications banales comme "c'est pour la bonne cause papà mio" ou "je devais être la plus belle pour le bal !". Comme d'habitude, il grommellerait encore un peu et finirait par dire "de toute façon je n'ai plus le choix maintenant" et elle lui collerait un bisou sur la joue en le remerciant et en disant que c'était la dernière fois -avant la prochaine-.

Elle arriva légèrement en retard, et de fait ne put se tenir à quelques pas du marquis pour saluer une seconde fois celles et ceux qui lui faisaient l'honneur de venir au bal qu'elle avait organisé. Elle se contenta donc de rester dans un coin de la salle, masquée , guettant l'arrivée de son père ou de celle de Giulia. Elle avait tant de choses à lui raconter ! Ce fut son amie qui arriva la première. Elle la reconnut car la famille Guantieri était la seule sur l'île à compter en son sein 6 membres, et uniquement des femmes. Exception faite du père évidemment. Ne lui restait plus qu'à trouver Giulia parmi ses soeurs, et elle inspecta donc scrupuleusement les mimiques avant de faire son choix et de s'approcher pour la saluer. Elles eurent à peine le temps d'échanger quelques mots que le regard de Lucia fut attiré par l'homme de la soirée, ou du moins, le second après le marquis : Fabrizio. Elle s'excusa donc auprès de son amie et se dirigea avec hâte vers son père :


-Bonsoir mon croquignolet, dit-elle avec un sourire malicieux avant de rire doucement.

Là encore, ils n'eurent pas vraiment le temps d'échanger quelques mots, car le marquis prit place au milieu de la salle, probablement pour ouvrir le bal. Elle s'attendait donc simplement à quelques mots d'italien pour dire à tout le monde de s'amuser et d'oublier les problèmes le temps d'une soirée, mais ce fut un discours bien plus long que le Liancy prononça. Il remerciait tous ceux qui avaient participé à l'organisation de cette fête, et rien qu'à ces mots, elle se sentait déjà fière de tout ce qu'elle avait accompli pour en arriver là. Plus encore en voyant que tout le monde avait l'air, au premier abord, ravi de se trouver là plutôt que d'être chez eux à se morfondre. Pourtant le marquis ne s'arrêta pas à un discours complètement impersonnel qui la satisfaisait déjà grandement ; il la nomma expressément. Là, le rouge commença à lui monter aux joues, et elle se tourna instinctivement vers son père, comme si elle cherchait un regard qui lui confirmerait qu'elle avait bien entendu. S'apprêtant à saisir la main tendue de Fabrizio qui l'invitait pour cette première danse, elle s'arma de son plus beau sourire en voyant qu'elle n'avait pas rêvé cet instant. Sur ces entrefaites, ce fut le marquis qui s'approcha d'eux et qui tendit également sa main pour inviter la jeune femme à danser. Ne voulant pas embarrasser sa fille avec un choix crucial, le Casari retira immédiatement sa propre main, laissant donc place nette au marquis. Lucia lui fit un aimable signe de tête et reporta toute son attention sur le roux, et de son bel accent français répondit en lui tendant le dos de sa main d'un air espiègle :


-Je vous présence mon main, vous devez la embrasser avant. Comme dans la Royaume de France. Après je vas danser avec vous avec beaucoup plaisir la Tua Magnificenza !
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Message par Rodrigue de Liancy Dim 17 Avr - 14:46

Elle n'avait pas oublié l'affront du baisemain. Une femme n'oubliait jamais lorsqu'on les offensait, et vous en tenait rigueur pendant des siècles et des siècles. Heureusement pour le Liancy, Lucia le faisait sur le ton de l'humour. Rodrigue s'exécuta donc, non sans avoir salué Fabrizio Casari d'un signe de tête auparavant, prenant délicatement la main qu'elle lui tendait avant de se pencher pour simuler un baisemain, faute de pouvoir lui en faire un réellement à cause de son masque. Il l'entraîna ensuite auprès des autres danseurs qui étaient fin prêts. La première danse pouvait commencer.

Derrière son masque, le Marquis observait la jeune femme danser avec lui, dans un silence pensif. Au cours des trois dernières semaines, il avait pu remarquer que Lucia était bien plus belle qu'il ne l'avait d'abord vue, lors de sa visite avec son père. Elle était vive, avait de l'esprit, n'hésitait pas à lui répondre avec une légère insolence quand toutes les autres jeunes femmes de l'île avaient cette fâcheuse tendance à rougir plus que de raison et à se faire toutes timides face à lui. Était-ce la couronne de Marquis qui les impressionnait tant ? Ou lui, tout simplement, avec sa carrure imposante et peu commune ? Lucia n'avait été impressionnée par personne, pas même par les domestiques qu'elle avait su gérer avec brio. Toute cette soirée était son œuvre, et il était pleinement satisfait de constater qu'il dansait avec une jeune femme alliant intelligence et beauté. A force de la voir au château, il avait fini par se prendre d'affection pour elle. Il n'avait pas réellement d'ami ici, et même s'ils avaient peu eu l'occasion de parler, sa présence entre les vieux murs du château lui plaisait. Rodrigue avait même fini par penser de moins en moins à Astride, l'ayant douloureusement rangée dans sa tête comme un rêve inaccessible. Lucia, elle, était bien réelle, ce qui expliquait pourquoi il aimait sa compagnie.

Les cavaliers virevoltaient, se séparant et se retrouvant au gré du rythme de la musique jouée par les ménestrels. Et Rodrigue n'avait toujours pas dit un mot, se contentant de danser et d'observer, jusqu'à ce qu'il se décidât enfin à troubler son silence pour la complimenter.


- Vous êtes ravissante. J'espère que votre père ne m'en voudra pas de vous avoir invité pour cette première danse.

Le rouquin avait tout simplement usé de son privilège de Marquis. Ce soir, il allait pouvoir danser avec n'importe qui, n'importe quand. Lucia avait ses faveurs, mais peut-être allait-il trouver une autre cavalière épatante ? Bizarrement, il en doutait. La Casari était déjà la mieux vêtue de toutes les jeunes femmes qu'il avait pu croiser jusqu'à présent. Elle devait être également la plus accomplie. Mais les danses étaient éphémères et quand vint le moment de s'arrêter pour en entamer une autre, Rodrigue laissa la jeune femme rejoindre son père après l'avoir remerciée pour le moment passé en sa compagnie. La soirée ne faisait que commencer et le nombre incalculable de cavalières avec lesquelles il devait danser afin de n'offusquer personne le démoralisait déjà. Mais il s'y plierait, même s'il savait d'avance qu'il allait moins s'amuser qu'avec la belle Casari.
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Message par Lucia de Liancy Dim 17 Avr - 17:43

Ne sachant guère s'il ne parlait pas parce qu'il était trop concentré sur les pas de danse, ou parce que s'il s'essayait à l'italien pendant cet exercice il allait lui marcher sur les pieds, ou s'il n'avait tout simplement rien à dire, la jeune femme ne lance pas non plus la conversation. Elle n'avait certes aucun problème avec les danses italiennes quelles qu'elles soient, mais elle ne serait pas capable non plus de réfléchir à son français en même temps qu'elle réfléchirait au pas suivant. Et comme elle n'avait aucune envie de chuter devant tant d'invités, elle préférait, elle aussi, garder le silence et se contenter d'observer son cavalier d'un air tout aussi songeur que le sien. Maintenant qu'elle le voyait de plus près, elle pouvait se rendre compte de tout un tas de choses qu'elle n'avait pas pris le temps de remarquer plus tôt, comme la couleur de ses yeux par exemple.

Lorsque le marquis se décida enfin à briser la glace, ce fut pour lui faire un compliment sur sa beauté. Sans vouloir se vanter, elle y était tellement habituée qu'elle se contenta d'un fier sourire en coin avant de lui répondre que son père ne lui en voudrait probablement pas, et qu'il l'avait invitée pour qu'elle ne se trouve pas sans cavalier pour la première danse. Ils firent encore quelques pas de danse dans le silence retrouvé, et les ménestrels s'arrêtèrent quelques secondes, le temps pour ceux qui le souhaitaient de faire du charivari dans les couples de danseurs. Elle fit une petite courbette et le laissa partir à la rencontre d'une nouvelle jeune femme, non sans avoir esquissé une grimace dès lors qu'il lui eu tourné le dos. Elle jeta ensuite un regard circulaire dans la pièce, à la recherche de Giulia, qu'elle trouva rapidement près du buffet en train de discuter avec l'une de ses soeurs. La Casari s'en approcha, s'excusa auprès de Paola de lui emprunter sa grande soeur et elles allèrent toutes les deux dans un coin de la salle, prêtes à papoter de tout et de rien, mais surtout du marquis. Si Lucia avait tendance à beaucoup parler lorsqu'elle était en bonne compagnie, Giulia, elle, parlait beaucoup, et très vite !


-Tu as vu, il danse avec Felicita Acciaro !
-Comment diable l'as-tu reconnue ?
-Regarde bien sa robe, tu vois bien qu'elle est tout engoncée là dedans ! Tu connais d'autres femmes aussi grosses qu'elle sur l'île ?
-Ta soeur.
-... Oui ! Mais t'as bien vu qu'elle n'était pas avec lui, elle était avec moi !
-Exact.
-Oh et raconte ! J'ai bien vu que tu dansais avec lui juste avant. Il danse bien ? Il est beau ? Il est gentil ? Alleeeeeez ! Oh ! Et c'est très beau ce que tu as fait tu sais.
-Merci. Sourire en coin. Il danse bien oui. Il n'est guère bavard mais avec toi il parlera peut être plus... Pipelette que tu es ! Petit rire.
-Je parle trop ? Han mais ! Tu veux dire qu'il va danser avec moi ? C'est vrai ?!
-Il va danser avec toutes les femmes je pense. M'est d'avis qu'il a organisé ce bal pour se trouver une épouse.
-Ah ouiiiiii !!!

La Casari hocha lentement la tête, comme si elle confirmait ce qu'elle venait d'annoncer. En vérité, si elle avait lancé Giulia sur ce sujet, c'était parce qu'elle savait pertinemment qu'elle lui en parlerait dès qu'il l'inviterait à danser. Et comme il n'y avait rien de plus énervant pour un homme que de lui parler de mariage, elle venait tout simplement d’annihiler toutes les chances de la Guantieri auprès du marquis. C'était méchant, et vil, mais nécessaire si elle voulait évincer la concurrence. Maintenant que cette bonne chose était faite, il était temps d'aller trouver un autre cavalier, car si elle aimait les bals, ce n'était pas parce qu'elle aimait regarder les autres danser tandis qu'elle se trouvait sur le banc de touche. Le seul homme de l'assemblée qui l'intéressait -à part le marquis- c'était Romeo Ferrero, le cousin de Giulia. Il était à peine plus vieux qu'elles, et s'il n'était pas désagréable à regarder, il n'en restait pas moins extrêmement limité intellectuellement. Peu de choses l'intéressaient à part les mathématiques et la navigation, les deux seules connaissances d'une importance cruciale pour un noble marchand en somme. Il était donc fait pour rester à la place où il se trouvait, ni plus ni moins. Ne restait plus qu'une chose à faire : le retrouver parmi les convives. Ce qui ne fut pas une mince affaire, mais elle finit par lui mettre le grappin dessus ! En effet, peu captivé par la gente féminine, il était resté assis sur un banc avec son vieux père à parler affaires. Elle se pencha donc vers eux et dit :

-Permettez que je vous l'emprunte noble sire ?
-Mais avec plaisir gente dame. Répondit le père.

Sans trop savoir ce qui était en train de lui arriver, Romeo se vit embarqué par la belle italienne pour la prochaine danse. La quatrième ou peut être même la cinquième ou sixième de la soirée. En attendant que cela ne commence, ne voulant pas entamer une danse sur une mélodie déjà bien entamée, elle fit un brin de discussion avec son cavalier sur le bord de la piste. Evidemment, il ne fut pas question de potins, mais plutôt de chiffres et d'astronomie. Heureusement que la Casari prêtait elle aussi attention à ces deux domaines, histoire d'avoir de quoi tenir le crachoir en attendant de se dégourdir les souliers.
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Message par Rodrigue de Liancy Dim 17 Avr - 18:40

Sa nouvelle cavalière était la fille d'un petit notable sans réel influence au sein de l'île. Et cela se ressentait jusque dans l'éducation de la jeune femme qui ne semblait absolument pas à l'aise avec le Marquis. En réalité, elle avait même manqué de s'évanouir lorsqu'il l'avait invitée à danser. Rodrigue avait donc essayé de limiter la casse en ne lui parlant que peu et en cherchant une nouvelle cavalière. La suivante était un peu plus dégourdie, mais bête comme ses pieds. Son rire était similaire au hennissement d'une jument et dans son enthousiasme elle avait écrasé deux fois les pieds du Liancy. Le pauvre n'était pas au bout de ses peines, car à la danse suivante il invita Giulia Guantieri à danser avec lui. Il avait repéré la petite troupe des Guantieri et, madame Guantieri ayant été prolixe d'un point de vue descendance avec pas moins de quatre filles à son actif, il s'était promis de ne danser qu'avec une des filles. Son choix s'était tout naturellement porté sur l'aînée. Il la savait bavarde et rapidement pénible, car elle avait fait une excellente démonstration de tous ses défauts lorsqu'elle était venue au château en compagnie de son père. A peine avaient-ils commencé à danser qu'elle s'escrimait à l'assaillir de questions.

- Dites moi Marquis, j'ai entendu dire que vous organisiez ce bal pour trouver une épouse gigliesi, c'est vrai ?
- Qui vous a dit cela ? répondit-il d'une voix faussement aimable.
- Oh... Euh... Ah...! C'est un bruit qui circule à Giglio Porto depuis quelques jours. Vu que vous êtes seul dans ce grand château !
-  Vraiment ? Et bien ce n'est pas exact, ou pas tout à fait du moins. Ce bal est plus destiné à favoriser les échanges entre les notables dans une ambiance festive, et pour moi, à me permettre de faire mieux connaissance avec la haute société de l'île.

Rodrigue s'arrêta car la danse les obligeait à se séparer de quelques pas. Revenu auprès d'elle, il crut bon toutefois de faire une petite précision, pour ne pas totalement la contredire et lui faire croire qu'elle s'était absolument fourvoyée :

- Mais peut-être vais-je y rencontrer ma future épouse, je ne peux prédire l'avenir.
- Ah oui je vois ! Non parce que je pense que c'est important pour vous de trouver une épouse ici. Les notables vous tiendraient peut être en plus haute estime. D'autant que cela voudra dire que vous aurez des enfants qui sont réellement originaires d'ici, qui reprendront le trône ensuite. Enfin, je ne dis pas que vous allez mourir tout de suite mais... Je ne peux pas prédire l'avenir non plus !

Dieu qu'elle était bavarde ! Rodrigue se contenta de rire, lui expliquant qu'il comprenait son point de vue et que s'il n'avait pas tout à fait eu le temps de songer à ce problème, la question se poserait à lui bien assez rapidement. Le Liancy remarqua qu'elle s'apprêtait à se lancer dans un énième discours inintéressant quand la musique s'arrêta, marquant la fin de la danse. Il se retrouva alors avec la jeune Cristina Sapiento, qui était déjà bien plus intéressante que les cavalières avec qui il avait dansé depuis Lucia. Elle était un brin timide, modeste, comme sa famille, mais elle était pourtant charmante, avec une toute petite voix douce qui aurait enchanté bien de jeunes hommes se prenant pour des chevaliers à la recherche d'une petite princesse à cajoler. Le Marquis avait dépassé ce stade depuis bien longtemps, et la jeune Sapiento ayant fini par se murer dans un profond silence afin de se concentrer sur ses pas de danse, il s'était mis en tête d'essayer de trouver Lucia parmi la foule. Il voulait savoir avec qui elle dansait, si elle s'amusait. Car de son côté, il s'ennuyait un peu malgré toutes les jeunes femmes avec lesquelles il avait dansé.

Au bout de quelques minutes il l'aperçut à côté d'un jeune homme. Rodrigue n'arrivait pas à trouver qui était ce jeune homme, mais il avait furtivement pu constater que sa tenue était à pleurer. Derrière son masque, Rodrigue grimaça. Il ne pouvait pas la laisser avec cet inconnu qui était si mal habillé ! Mais surtout, il découvrit en lui une pointe de jalousie. Lucia était la seule femme à résider au château, la seule qu'il semblait supporter, et il n'aimait pas l'idée de peut-être la voir partir car un petit notable sans envergure aurait fini par la charmer. Sa résolution fut vite prise : à la fin de la danse, il irait la trouver et l'inviter de nouveau.

Étrangement, cette danse lui parut plus longue que les précédentes. Lorsque la musique cessa, Rodrigue remercia la douce et gentille Cristina Sapiento et se fraya un chemin parmi les invités pour retrouver Lucia. Il devait se dépêcher car l'inconnu allait sûrement lui demander de danser avec lui. Arrivé devant eux, Rodrigue les toisa quelques secondes. « Mal habillé et gringalet en plus » pensa-t-il en voyant le jeune homme. Le roux s'adressa à ce dernier dans son italien légendaire, teinté de son accent français qui lui donnait pourtant un charme supplémentaire :


- Puis-je vous emprunter cette chère demoiselle qui se trouve à vos côtés ?

Impressionné, l'inconnu hocha de la tête. Rodrigue prit donc doucement la main de Lucia et l'attira avec lui pour rejoindre les danseurs, la musique venant tout juste de reprendre. Cette fois il était inspiré, et les mots lui vinrent simplement, en français :

- Si je peux me permettre, vous êtes bien mieux à danser qu'à discuter de la pluie et du beau temps avec quelqu'un avec qui vous vous assortissez si mal.

Rodrigue la fixa. Non, elle était vraiment trop bien pour le petit bonhomme à qui il l'avait volée. Le Liancy ne regrettait d'ailleurs pas de s'être permis cette fantaisie, ce bal redevenait agréable pour lui. Allez savoir pourquoi.
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Message par Lucia de Liancy Dim 17 Avr - 20:50

Elle s'apprêtait à guider Romeo au milieu des autres couples lorsque le marquis fit de nouveau son apparition. S'arrêtant tout net dans ce qu'elle était en train de faire, elle attendit de voir ce qui le ramenait à elle. Il ne tarda pas à exprimer son envie de faire une nouvelle danse avec elle, malgré toutes les femmes qu'il y avait dans la salle. Il n'y avait eu que quelques danses depuis l'ouverture du bal, et il n'y en avait certainement pas eu assez pour que chacune soit passée dans les bras du Liancy. Comme à chaque fois que le Liancy parlait italien, elle se sentait fondre de l'intérieur, tant l'accent était charmant. Pourtant elle n'en montrait jamais rien, ne voulant pas paraître aussi cruche que toutes les autres femmes de l'assemblée. A contrario, elle essayait de dissimuler son sourire vainqueur afin qu'aucun des deux hommes près d'elle à cet instant n'aille s'imaginer quoi que ce soit concernant son dessein. Elle était prête à rétorquer en disant qu'elle avait déjà promis la prochaine danse au Ferrero, mais la faiblesse de l'italien eu raison de son envie de se faire désirer. Elle leva furtivement les yeux au ciel, dépitée par le comportement de ce pauvre Romeo. Il ne trouverait jamais d'épouse en étant si peu entreprenant. Certes les femmes italiennes se montraient plus avenantes que les françaises, mais il ne fallait quand même espérer les voir tout faire... Elle secoua lentement la tête de gauche à droite avant de plonger son regard sombre dans le vert des yeux de Rodrigue et de lui tendre la main. Rapidement, ils se retrouvèrent au milieu des autres couples. Alors qu'elle s'attendait à une danse silencieuse comme la première, cette fois le roux ne tarda pas à s'exprimer, en français pour plus de facilités sans doute. Elle hésita quelques secondes, réussissant tout juste le pas suivant, et finit par choisir de répondre en italien. Car si elle comprenait très facilement le français et n'avait pas réellement besoin de se concentrer pour ce faire, le parler était une autre paire de manches, qui lui demandait bien plus de ressources ; dont elle ne disposait pas à l'heure actuelle.

-Si vous connaissiez Romeo Votre Magnificence, votre discours serait tout à fait différent. Il n'aime guère parler de la pluie et du beau temps. En réalité, nous parlions astronomie en attendant que la prochaine danse ne soit lancée.

Volontairement, elle ne répondit pas immédiatement à la petite remarque concernant son "assortiment" avec l'italien. Elle se contenta d'un sourire en coin tandis que la danse les obligeait à s'éloigner quelques instants. Ses mouvements étaient aussi gracieux qu'ils pouvaient l'être, et elle y prêtait une grande attention. Le Liancy n'avait d'yeux que pour elle le temps d'une musique, et elle devait montrer toute l'étendue de son charme afin qu'il se souvienne longtemps de "la jeune femme qui dansait avec déité". Evidemment, elle avait bien d'autres atouts, qu'elle n'avait pas encore eu le temps de lui montrer depuis qu'elle se trouvait au château. Ces dernières semaines, elle avait plutôt montré sa détermination lorsqu'on lui confiait une tâche. Bien qu'il s'agissait là d'une qualité des plus appréciables, du moins le pensait-elle. Puis elle se retrouva à nouveau proche du marquis, son sourire ne l'ayant pas quittée, elle cligna lentement des paupières avant de reprendre sur un ton enchanteur :

-Dois-je comprendre que vous considérez que nous sommes mieux assortis ? Sans doute me fourvoie-je, mais vos propos sont sujet à interprétation...
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Message par Rodrigue de Liancy Dim 17 Avr - 22:16

Romeo. Ainsi l'inconnu s'appelait Romeo. En cherchant dans sa mémoire, Rodrigue compléta le nom : Romeo Ferrero. Lui aussi était venu se présenter en compagnie de son père. Un jeune homme un peu faiblard, avec un visage avenant, mais terriblement ennuyeux et peu sûr de lui. Le Liancy comprenait donc mieux pourquoi il avait été si facile de lui subtiliser sa cavalière. Il lui faisait penser à Yvain. Ce qui n'était vraiment pas à l'avantage du fils du marchand. Sans se démonter Rodrigue répondit donc :

- D'astronomie ? Il remonte dans mon estime. Mais cela ne change rien.

Ils s'éloignèrent, puis se retrouvèrent. Malgré la question de Lucia, Rodrigue ne répondait pas. Il se maintenait volontairement dans le silence, non pas pour gagner du temps, mais pour mieux apprécier la danse et sa cavalière. Elle surpassait toutes les autres jeunes femmes. Elle dansait mieux que les autres, s'habillait mieux que les autres, et était plus belle que les autres. Il ne l'avait probablement jamais vue sourire autant, et il découvrait que même son sourire était plus joli que celui des autres. Lui plaisait-elle ? Évidemment. Lucia n'était pourtant pas son genre de femme, lui qui jusqu'à présent était plutôt attiré par les blondes. Mais la Casari le troublait, et lui faisait justement oublier son histoire avec Astride. Elle était différente, et c'était cette différence qui lui plaisait. Rodrigue pensait donc naturellement qu'ils étaient tous les deux mieux assortis qu'elle et Romeo Ferrero.

Après avoir été de nouveau séparés par les aléas de la danse, ils se rapprochèrent. Le Liancy en profitant pour délivrer sa réponse, en français, dans un ton absolument décontracté.


- Sincèrement ? Oui. Mais avez tout à fait le droit de ne pas être d'accord.

Il aurait pu détourner la conversation, trouver une astuce pour ne pas répondre directement. Mais ce n'était pas son genre et il avait très bien compris que Lucia était adepte de la même franchise que lui. Et puis « oui » voulait à la fois tout et ne rien dire. A elle de l'interpréter comme elle le voulait.

La danse s'acheva, et pourtant Rodrigue n'avait pas envie de laisser repartir Lucia auprès de son Romeo. Depuis le début de la soirée il n'avait pas quitté la salle de bal réchauffée par la foule et l'air chaud de juillet. Le Liancy n'avait pas lâché les mains de sa cavalière et alors que de nouveaux couples de danseurs se formaient, le roux attira la Casari à l'écart.


- J'aimerais prendre un peu l'air. Et vous parler.

Sans vraiment attendre de réponse, Rodrigue l'invita à le suivre jusqu'à l'extérieur de la salle, puis du château, dans une toute petite ruelle vide devant le château, éclairée de quelques torches. Une fois seuls, il retira son masque sous lequel il étouffait, passa la main dans les cheveux pour les remettre correctement et inspira à plein poumons l'air frais. Puis il regarda Lucia qui portait toujours son masque à plumes. Lentement il se pencha vers elle et souleva le masque pour le lui retirer.

- Ah ! C'est mieux ainsi, s'exclama-t-il en italien dans un grand sourire.

Il pouvait admirer son beau visage et se convaincre que la décision qu'il venait soudainement de prendre était la bonne. Le plus naturellement du monde, comme s'il venait de ne rien faire, il reprit, toujours en italien :


- Le bal sera bientôt terminé. Et normalement dans quelques jours vous devriez retourner chez votre père à Giglio Porto. J'avais envisagé d'accueillir quelques personnes pour loger au château, afin d'occuper les chambres. Mais je n'ai pris aucune décision pour l'instant. Sauf pour une personne. Vous.

Il déploya son plus beau sourire, sachant pertinemment qu'elle accepterait.

- J'apprécie votre compagnie et vous semblez vous plaire ici. Je vous propose donc de rester, aussi longtemps que vous le souhaiterez. J'ai cru comprendre que vous appreniez le français, je pourrais donc vous aider, et vous pourrez me reprendre quand je fais des erreurs en italien. Qu'en dites-vous ?

Il ne lui avait pas parlé des présents qu'il avait prévu pour la remercier pour son travail. Cela attendrait la fin du bal. Elle viendrait bien assez vite, car Rodrigue avait remarqué que certains danseurs avaient déjà abandonné la partie, rejoignant les rangs des vieux notables et de ceux qui aimaient tout simplement se montrer en public, sans aimer la danse. Une chose était sûre, tous les convives semblaient s'amuser. Et lui aussi, même si ce n'était certainement pas grâce à Giulia Guantieri. Oh non.
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Message par Lucia de Liancy Mer 20 Avr - 21:45

Elle se contenta d'un regard qui voulait tout dire en guise de réponse lorsqu'il évoqua le fait qu'ils étaient bien mieux assortis qu'elle et Roméo. Elle aurait pu en faire des tonnes et s’engouffrer dans la brèche de la drague clairement assumée en voyant qu'il en remettait une couche en lui proposant d'aller discuter à l'extérieur, à l'abris des regards indiscrets, et surtout des oreilles indiscrètes, mais elle n'en fit rien. Elle acquiesça simplement, montrant qu'elle acceptait bien évidemment de le suivre, puisqu'il voulait lui parler. Elle n'était pas du genre à faire sa midinette dès qu'un homme plaisant daignait lui adresser la parole, perdant tous ses moyens et disant oui à tout et n'importe quoi tant que les beaux yeux du mâle convoité restaient posés sur soi. Elle savait se faire désirer, comment se faire détester pour mieux se faire pardonner, paraître suffisamment intelligente pour être de bonne compagnie, sans pour autant tout faire pour être plus futée que l'autre. Les hommes aiment discuter de sujets divers et variés, mais ils aiment aussi avoir le dernier mot, être les plus intelligents. Une fierté toute masculine sans doute. Et sachant cela, elle dosait tout simplement ses propres connaissances, aidée par sa curiosité naturelle heureusement.

Elle qui s'imaginait rester dans la Cour du château, se retrouva finalement dans une petite ruelle mal éclairée. Un endroit que bien des femmes n'auraient pas trouvé très rassurant. Lucia, elle, ne montra pas sa petite pointe d'inquiétude, essayant de se rassurer en se disant que le marquis volerait à son secours s'il devait lui arriver quelque chose. Elle serait par contre plus embêtée s'il devait advenir quelque chose au marquis lui même. Elle serait tout bonnement incapable de l'aider, si ce n'est en criant à l'aide à pleins poumons. Une femme italienne en détresse peut avoir la voix qui porte, très loin. Néanmoins, la ruelle semblait être complètement vide, limitant grandement toute possibilité d'attaque par surprise. Elle ne s'offusqua pas lorsqu'il lui retira son masque, ce qu'une femme française aurait certainement fait ! Ces femmes là s'offusquaient de tout de toute façon.


-Je suis beaucoup rassurée que vous préférez moi sans mon masque Marquis, ajouta-t-elle simplement dans un sourire.

Elle fit ensuite mine de réfléchir à ce qu'il était en train de dire, comprenant petit à petit qu'il allait lui demander de rester au château pour "meubler le vide". Intérieurement, la jeune femme n'hésitait pas sur l'issue ; elle voulait assurément rester au château. Son incertitude résidait plutôt dans la façon dont elle allait accepter cette proposition. Un "oui parce que vous êtes trop sexy" paraîtrait un peu, inquiétant. Un "oui mais" pourrait être interprété comme un caprice de jeune fille trop gâtée. Un "oui bien sur, j'adore le château" ne ferait que montrer qu'elle restait uniquement pour la classe de vivre dans château, que quelque soit le marquis elle aurait dit oui. Ce qui était certes vrai, mais elle préférait tout de même que le marquis soit Rodrigue plutôt qu'un vieux croulant et surtout moche. Il était temps de répondre, il ne fallait pas laisser planer le doute trop longtemps ou il pourrait retirer son offre. C'est en italien qu'elle répondit, sans même avoir eu le temps de bien penser sa réponse finalement :


-Votre Magnificence, je ne puis qu'être sincère avec vous. Il y a de cela trois semaines j'aurai accepté votre offre sans même y songer plus d'une seconde. Aujourd'hui, la situation est différente. J'ai pu voir ce que la vie de château impliquait en... suivantes, codes, et j'en passe, de fait je ne suis plus tout à fait sure de vouloir m'y soumettre.

Pourquoi avait-elle dit cela ? Soudain, elle songea qu'elle était peut être allée un peu loin dans le principe du "se faire désirer" et qu'il allait certainement accepter qu'elle retourne chez son père, comprenant aisément que toutes les femmes du monde ne rêvaient pas d'une vie de palais. Et s'il était vrai que certaines petites choses de ce genre de vie ne plaisaient pas à la Casari, la grande majorité de cette vie lui convenait tout à fait. Elle ne pouvait plus reculer maintenant, et elle trouverait cette nuit comment revenir dans la course.

-Néanmoins, je ne saurais refuser votre aide pour améliorer mon français. Elle y passa d'ailleurs. Je aime votre langue, mais un petit gens parlent le français dans Giglio. Et ces gens, je aime pas parler avec eux.... Ils sont ennuyant. Pause et sourire en coin. Comme Romeo.
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Message par Rodrigue de Liancy Mer 20 Avr - 22:46

Quel prétentieux avait-il fait ! Lui, Rodrigue de Liancy, Marquis de Giglio, si sûr de lui. Sûr de voir sa proposition acceptée sur le champ. Il avait pensé qu'elle s'était plu au château, qu'elle appréciait y vivre, notamment parce qu'elle ne dépendait plus directement de son père. Mais il s'était trompé. Lucia ne souhaitait pas rester, s'étant lassée de la vie de château. C'était une sorte de douche froide, et même si elle avait clairement cherché à nuancer son refus, la réponse avait été comprise cinq sur cinq. Le jeune homme hocha lentement de la tête, et lui sourit malgré tout :

- Je comprends. Je suis un peu déçu car je pensais que vous vous sentiez bien ici. Mais si tel est votre souhait, je n'insiste pas.

Le Liancy n'aimait pas perdre et encore moins le montrer. Dans son agacement, il n'avait même pas remarqué que Lucia venait d'expliquer que son Romeo était d'un ennui profond. Il remit donc le masque sur le visage de Lucia, puis le sien, et regarda en direction du château. Il n'y avait pas lieu de s'attarder plus longtemps. Il avait essuyé un refus, mais il ne comptait pas en rester là pour autant.

- Vous ne voulez pas rester, mais accepteriez-vous de m'accorder une dernière danse ? Quant au français… et bien je compte sur vous pour me rendre visite au château, faute d'y vivre, nous trouverons du temps pour converser, fit-il en italien tout en prenant sa main pour l'emmener vers le château.

Cette fois, elle accepta. Ils rentrèrent donc et se mirent à danser dès qu'ils purent rejoindre les autres danseurs. Malgré la déception, Rodrigue décida de profiter de cette dernière danse. Elle fut même la plus agréable de leurs trois danses. Peut-être parce qu'il savait très bien que ce serait la dernière pour lui, étant donné qu'il allait être occupé à remercier ses invités qui allaient tous partir les uns après les autres, et parce qu'il allait avoir une petite affaire à régler. Tout ça arriva bien plus vite qu'il ne l'avait imaginé. A la fin de la danse il fit à nouveau un faux baisemain, remercia Lucia et lui souhaita une agréable nuit, si d'aventure il ne la revoyait pas avant la fin définitive du bal. Il retrouva ensuite de petits groupes d'invités, discuta avec eux, leur faisant croire qu'il avait pour eux beaucoup d'intérêt. En réalité il se moquait bien de ce qu'ils pouvaient dire. Rodrigue n'était plus trop d'humeur, encore moins pour essuyer les politesses affligeantes de ses convives.

Certains partirent, d'autres commencèrent à rejoindre le premier étage où ils allaient passer la nuit.  Les autres étaient encore à discuter, ou à vaguement danser sur les derniers airs joués par des ménestrels au bout du rouleau. Certains semblaient encore engagés dans de grandes manœuvres de séduction. Constatant que Lucia n'était pas encore retournée dans ses quartiers, Rodrigue grimpa quatre à quatre les marches le menant vers le troisième étage, entraîna avec lui une domestique qu'il croisa en chemin, et entra dans son bureau. Rapidement, il prit un parchemin vierge, sa plume, et s'installa nonchalamment derrière son bureau. Tout en écrivant, il se mit à donner ses consignes :


- Vous voyez ces deux boîtes sur le fauteuil ? Vous allez les porter chez Mademoiselle Lucia Casari. Vous les déposerez bien en vue, sur son lit si possible. Vous irez dès que j'aurais fini d'écrire cette note.

La plume crissa rapidement sur le parchemin, couchant les mots en italien, sans fautes, du moins c'était ce qu'espérait Rodrigue. En une poignée de minutes le message était prêt, scellé.

Lucia,

Pour votre travail remarquable, pour ce bal qui fut une franche réussite – je n'en ai pas douté un seul instant, d'où ce message qui vous parvient si tôt – je tenais à vous remercier en vous offrant ces présents. J'espère qu'ils vous plairont. A titre personnel, je ne vois personne d'autre que vous pour les mettre en valeur.

Je regrette toujours votre souhait de quitter le château, mais sachez que je n'oublierai pas votre dévotion pour la tâche qui était la vôtre, ni le temps que vous y avez consacré.

RdL


La domestique, alourdie par les deux grosses boîtes et le petit mot qui était posé dessus, partit lentement, aidée par Rodrigue qui lui tint les portes les plus lourdes, jusqu'à ce qu'il reprenne la direction du rez-de-chaussée où il alla saluer les derniers invités sur le départ. Cette mission pénible accomplie, il remonta directement dans ses quartiers. Le bal était officiellement terminé pour lui. Les domestiques allaient prendre le relais, afin de faire place nette. Le lendemain matin, il n'y allait plus avoir la moindre trace du bal, juste des souvenirs. Dans les villages de Giglio, les gens parleraient de cet événement pendant une semaine, et tout allait redevenir comme avant.

Dans sa chambre, Rodrigue se déshabilla et gagna vite son lit, pensif. Il espérait sincèrement que Lucia aimerait ses cadeaux. Il lui était redevable, car si son prestige allait croître avec une telle soirée, il n'oubliait pas que sans elle, tout aurait été probablement moins réussi.
Rodrigue médita durant de longues minutes, toujours un peu déçu de son échec, puis s'endormit finalement, se disant qu'il trouverait bien une solution pour convaincre la Casari récalcitrante.
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